« Nous passons la nuit à la belle étoile, exposés aux maladies… » La voix brisée de Lawi Rushisha Crispin, président des sinistrés du camp de Katashola, résume le désarroi de dizaines de familles. Dans la nuit du vendredi 8 août 2025, un violent incendie a réduit en cendres une cinquantaine d’abris dans le village de Muhongoza, territoire de Kalehe, au Sud-Kivu.
Ces abris hébergeaient des déplacés fuyant les conflits armés et des sinistrés des inondations meurtrières de Nyamukubi et Bushushu. En quelques heures, tout a disparu : les maigres possessions, les toits de fortune, l’espoir d’un lendemain meilleur. Delphin Birimbi, président du cadre de concertation de la société civile du territoire de Kalehe, confirme : « Une cinquantaine de maisons avec tous les biens des ménages sont parties en fumée. »
Près de 300 personnes, dont une majorité d’enfants et de femmes, se retrouvent brutalement sans toit. Les flammes ont tout emporté : les sacs de haricots et de maïs, les matelas déjà usés, les documents administratifs précieux pour tenter de reconstruire une identité. « Nous avons tout perdu, même les casseroles pour cuire le peu que nous recevons », confie une mère de famille sous le choc.
« Nous lançons un cri d’alarme aux autorités et organisations humanitaires : apportez une assistance d’urgence ! »
Lawi Rushisha Crispin insiste sur l’urgence sanitaire : sans abri, les familles sont à la merci des intempéries et des épidémies. La situation est d’autant plus critique que ce drame survient moins d’un an après un incendie similaire. Le 20 décembre 2024, plus de 100 abris avaient été calcinés dans la même zone, plongeant déjà la communauté dans le désespoir.
Comment expliquer cette répétition des tragédies à Katashola ? Les abris, construits à la hâte avec des matériaux inflammables, sont souvent surpeuplés. L’absence de mesures de prévention contre les incendies et la précarité générale transforment ces camps en poudrière. Les déplacés de Kalehe, déjà traumatisés par la guerre ou les catastrophes naturelles, vivent dans une insécurité permanente. Pourquoi la reconstruction après les inondations de 2023 reste-t-elle aussi fragile ?
La saison des pluies aggrave le calvaire. Les températures nocturnes chutent, et les sols détrempés deviennent des nids à moustiques. « Hier soir, mes enfants tremblaient de froid. Comment les protéger sans couverture ? », s’interroge un père de famille. Les premiers cas de toux et de fièvre sont déjà signalés parmi les sinistrés du Sud-Kivu.
Face à cette urgence, la réponse humanitaire en RDC tarde à se concrétiser. Les organisations sur place, bien qu’alertées, n’ont pas encore déployé d’assistance significative. Les autorités locales promettent une évaluation « dans les meilleurs délais », mais les déplacés rappellent amèrement qu’après l’incendie de décembre 2024, certains ont attendu trois semaines sous la pluie avant de recevoir des bâches. Cet incendie à Katashola révèle-t-il notre incapacité à protéger les plus vulnérables ?
Ces abris détruits symbolisent un enjeu sociétal criant : la dignité bafouée des victimes cumulant exils forcés et catastrophes naturelles. Sans une coordination urgente entre gouvernement, acteurs humanitaires et société civile, combien de nouveaux drames faudra-t-il pour secouer les consciences ? La solidarité nationale doit répondre avant que l’hiver ne s’installe dans le Kivu.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd