Ce mercredi 26 novembre, l’aéroport de Bipemba à Mbujimayi s’est transformé en un sanctuaire d’émotions brutes, où les larmes se mêlaient aux souvenirs d’un rire qui ne résonnera plus. Le cercueil de Felly Nyembue Ngoyi, plus connu sous le nom de Tshiamua Tshia Or, est descendu de l’appareil sous le regard d’une foule venue rendre un ultime hommage à celui qui a bercé leur quotidien de son humour authentique.
La scène était à la fois tragique et poétique : des centaines de mains se tendant vers le cercueil, des épaules qui tremblaient sous le poids de l’absence, des murmures qui racontaient chacun une histoire différente mais toutes unies par la même gratitude. Comment un simple humoriste avait-il pu tisser autant de liens invisibles entre les générations ? La réponse se lisait dans les yeux rougis de Mukendi Grégoire, qui confiait d’une voix brisée : « Il m’a accompagné de 2012 à 2017 avec son humour. Je regardais ses sketchs et ses comédies pour me détendre. Il me manquera beaucoup. »
Au-delà de la douleur immédiate, ce rapatriement du corps à Mbujimayi révélait l’empreinte profonde laissée par Tshiamua Tshia Or dans le paysage culturel congolais. Jean-Claude Mutombo, 14 ans, incarnait cette transmission intergénérationnelle : « Ma carte mémoire était remplie de ses vidéos. Chaque fois que je les regardais, je ne pouvais pas m’empêcher de rire. C’était vraiment quelqu’un de spécial. » L’adolescent témoignait ainsi de la pérennité d’un art qui avait transcendé les époques et les technologies.
L’arrivée du cercueil de Tshiamua Tshia Or à Mbujimayi représentait bien plus qu’un simple transfert physique : c’était le retour d’un fils prodigue vers sa terre natale, la concrétisation d’une promesse du gouverneur Jean-Paul Mbwebwa Kapo, mais surtout la matérialisation d’un deuil collectif. Chantal Mujinga, étudiante présente lors de ce rapatriement émouvant, résumait l’essence même de l’œuvre de l’artiste : « Il faisait rire tout le monde autour de lui. Même quand j’étais triste, ses sketchs me redonnaient le sourire. »
La disparition de Tshiamua Tshia Or survenue le 12 novembre à Lubumbashi, alors qu’il était en tournée avec l’artiste « C’est ça l’homme », laisse un vide immense dans le cœur des Congolais. Son humour, à la fois proche du peuple et universel, avait cette rare capacité de transformer les préoccupations quotidiennes en moments de légèreté partagée. N’était-ce pas là la marque des grands artistes que de savoir extraire la joie des situations les plus banales ?
Ce rapatriement du corps à Mbujimayi, pris en charge par le gouvernement provincial comme l’avait annoncé le gouverneur, dépasse le simple cadre administratif. Il s’agit d’un acte de reconnaissance officielle envers un artiste qui a su capturer l’âme congolaise à travers son art. L’inhumation prévue samedi 29 novembre 2025 promet d’être un moment de communion nationale, où les rires et les larmes se mêleront pour célébrer une vie dédiée à l’humour.
Le parcours de Tshiamua Tshia Or interroge sur la place de l’humoriste dans la société congolaise contemporaine. Plus qu’un simple divertisseur, il était devenu un compagnon de route pour des milliers de Congolais, un confident virtuel qui accompagnait leurs moments de détente et de réflexion. Son décès brutal nous rappelle la fragilité de ces artistes qui tissent l’invisible toile émotionnelle d’une nation.
Alors que Mbujimayi se prépare aux derniers adieux, une question persiste : comment perpétuer l’héritage de cet humoriste congolais disparu ? Peut-être en continuant de partager ses sketchs, en racontant ses blagues, en transmettant cette joie qui caractérisait son approche de la vie. Car si le comédien RDC n’est plus, son rire, lui, résonnera encore longtemps dans la mémoire collective.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd
