Alors que les efforts humanitaires se multiplient dans l’est de la République Démocratique du Congo, l’épidémie de rougeole dans le Nord-Kivu continue de faire des victimes, principalement parmi les enfants les plus vulnérables. Comment expliquer cette résistance tenace d’une maladie que l’on sait pourtant évitable par la vaccination ?
Entre les mois d’avril et novembre 2025, l’organisation Médecins Sans Frontières a pris en charge plus de trois mille cas de rougeole dans les territoires de Masisi et Rutshuru. Ces chiffres alarmants révèlent l’ampleur d’une crise sanitaire qui frappe particulièrement les enfants de moins de cinq ans, population la plus exposée aux complications graves de cette maladie virale.
Dans la zone de santé de Katoyi et Kirotshe, située dans le Masisi, 1 856 patients ont reçu des soins entre octobre et mi-novembre 2025, dont 756 cas présentant des complications nécessitant une prise encharge médicale intensive. Parallelèlement, dans la zone de santé de Binza au Rutshuru, les équipes médicales ont traité 1 195 autres patients, parmi lesquels 355 cas graves recensés entre mi-avril et novembre.
Mais pourquoi cette persistance de l’épidémie de rougeole malgré les interventions des organisations humanitaires ? Les responsables sanitaires pointent du doigt plusieurs facteurs interdépendants qui créent un terrain propice à la propagation du virus. La couverture vaccinale insuffisante constitue le premier maillon faible dans cette chaîne de vulnérabilités. Comment vacciner efficacement lorsque les chaînes du froid sont régulièrement rompues, compromettant la conservation des vaccins ?
La situation sécuritaire volatile dans la région représente un autre défi majeur. Les violences récurrentes rendent certaines zones inaccessibles aux équipes médicales, empêchant la conduite de campagnes de vaccination porte-à-porte et l’acheminement des vaccins vers les populations les plus isolées. Cette insécurité chronique provoque par ailleurs des déplacements massifs de populations, créant des conditions de vie précaires où la malnutrition sévit, affaiblissant davantage le système immunitaire des enfants.
Face à cette crise sanitaire complexe, MSF maintient ses interventions sur plusieurs fronts. L’organisation poursuit le traitement des malades, l’hospitalisation des cas graves et appuie les campagnes de vaccination. En juin dernier, près de cent mille enfants de moins de cinq ans ont ainsi été vaccinés dans le territoire de Masisi. De nouvelles campagnes sont planifiées pour fin novembre et début décembre dans les zones de Katoyi et Kirotshe, visant des dizaines de milliers d’enfants supplémentaires.
Néanmoins, les besoins restent considérables et les moyens financiers insuffisants pour faire face à l’ampleur de cette épidémie de rougeole. La situation appelle à une mobilisation urgente et coordonnée de tous les acteurs pour briser le cycle de transmission du virus et protéger durablement les enfants congolais contre cette maladie évitable.
La rougeole, bien que souvent perçue comme une infection bénigne, peut entraîner des complications sévères chez les enfants malnutris ou au système immunitaire affaibli. Pneumonies, encéphalites et diarrhées sévères comptent parmi les risques les plus graves, pouvant mener au décès dans les contextes de précarité médicale. Dans les territoires de Masisi et Rutshuru, où l’accès aux soins reste limité, chaque cas de rougeole représente donc une menace potentiellement mortelle.
La solution passe nécessairement par le renforcement des systèmes de santé locaux et la sécurisation des routes d’approvisionnement en vaccins. Mais comment y parvenir sans une paix durable dans la région ? La question dépasse le cadre purement médical et interpelle l’ensemble des parties prenantes sur la nécessité de créer des conditions stables permettant aux interventions sanitaires d’atteindre leur pleine efficacité.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net
