« Nous sommes prisonniers dans notre propre village », témoigne Jean-Baptiste, commerçant à Tchofi, les yeux rivés sur la route défoncée. Depuis deux semaines, les pluies diluviennes qui s’abattent sur le Sud-Kivu ont transformé la route Bukavu-Goma en un véritable champ de bataille. Au niveau du village de Tchofi dans le territoire de Kalehe, la situation est devenue catastrophique.
Des glissements de terrain ont enseveli des portions entières de la chaussée, tandis que l’accumulation de mottes de terre rend la circulation extrêmement périlleuse. « Les véhicules restent embourbés pendant des heures, parfois des jours », raconte Marie, habitante de Nyabibwe. « Comment faire pour amener les malades à l’hôpital ? Comment approvisionner nos boutiques ? »
La rivière Kalinga, sortie de son lit, a aggravé le chaos. Ses eaux tumultueuses menacent désormais de couper complètement la route, isolant définitivement toute une région. Cette dégradation de la route nationale numéro 2, artère vitale reliant Bukavu à Goma, paralyse les activités socio-économiques dans un territoire déjà fragilisé par des années de conflits.
Les populations se sentent abandonnées. En juin 2025, les responsables de la rébellion M23 avaient pourtant promis la réhabilitation de ce tronçon stratégique. Quatre mois plus tard, les engins lourds se font toujours attendre. « Nous avons cru en leurs promesses, mais nous ne voyons que de la poussière et de la boue », déplore un chef local sous couvert d’anonymat.
Cette situation d’isolement du territoire Kalehe n’est pas sans conséquences humanitaires. Les prix des denrées alimentaires ont flambé, les produits médicaux se raréfient, et les déplacements deviennent un calvaire quotidien. Comment expliquer cette inertie des autorités face à l’urgence ? Pourquoi la réhabilitation route promise tarde-t-elle tant à se concrétiser ?
Les pluies Sud-Kivu, bien que saisonnières, révèlent une vérité plus cruelle : l’absence d’infrastructures résilientes et la marginalisation de toute une région. Tchofi, Nyabibwe et les autres localités de Kalehe paient le prix fort de cette négligence. Le territoire Kalehe se transforme progressivement en une prison à ciel ouvert, où l’accès aux services de base devient un luxe.
La dégradation route Bukavu Goma symbolise l’abandon d’un territoire pourtant riche en potentialités. Les paysans ne peuvent plus écouler leurs productions, les élèves peinent à rejoindre leurs écoles, et le tissu social se délite jour après jour. Cette crise des infrastructures interroge la capacité de l’État à assurer sa présence dans les zones reculées.
Face à cette urgence, la société civile locale appelle à une mobilisation immédiate. « Il ne s’agit pas seulement de réparer une route, mais de sauver des vies », insiste un activiste rencontré sur place. L’isolement territoire Kalehe pourrait avoir des conséquences dramatiques si aucune solution n’est trouvée avant la prochaine saison des pluies.
La balle est désormais dans le camp des autorités. Entre promesses politiques et réalités du terrain, la population de Tchofi et des environs attend des actes concrets. Car derrière cette dégradation route Bukavu Goma se cachent des drames humains, des espoirs brisés et un développement entravé. Combien de temps encore devront-ils patienter ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net