La zone minière de Luhihi, à cheval entre le territoire de Kabare et la ville de Bukavu, vit des heures sombres depuis la fermeture imposée par les rebelles de l’AFC/M23 le 30 août 2025. Cette décision unilatérale a transformé ce qui était autrefois un site d’exploitation artisanale dynamique en un foyer de violence et d’insécurité généralisée.
L’interdiction d’accès au site minier, justifiée par des raisons sécuritaires selon les auteurs de cette mesure, a provoqué un exode massif des creuseurs artisanaux. Originaires du Nord-Kivu, du Sud-Kivu et des pays limitrophes, ces travailleurs ont dû abandonner brutalement leur seule source de revenus. Le vide laissé par leur départ a créé les conditions idéales pour l’émergence de nouvelles formes de criminalité.
Comment une zone autrefois prospère a-t-elle pu sombrer aussi rapidement dans le chaos ? La réponse se trouve dans la précarité sociale générée par cette fermeture soudaine. Des centaines de jeunes, privés de leur moyen de subsistance, se sont retrouvés sans alternatives économiques viables. Cette oisiveté forcée a alimenté une recrudescence inquiétante des cambriolages, agressions armées et vols dans les quartiers périphériques.
Mulambula, Cikonyi à Bagira, et Irambo dans la commune d’Ibanda sont devenus les épicentres de cette violence urbaine. Les habitants de ces zones rapportent des attaques nocturnes de plus en plus fréquentes et violentes. La société civile locale pointe du doigt l’absence de solutions de reconversion pour les jeunes affectés par la fermeture du site minier artisanal.
Face à cette situation explosive, les forces de sécurité déployées par le M23 ont procédé à plusieurs arrestations. Au moins quatre présumés auteurs d’actes criminels ont été interpellés. Mais ces mesures semblent insuffisantes pour endiguer la vague de criminalité. Les témoignages recueillis sur place décrivent une situation qui échappe progressivement à tout contrôle.
La récente incursion armée à Ishungu vient tragiquement confirmer cette tendance. Cet incident sanglant a coûté la vie à une personne et fait plusieurs blessés. Mapenzi Manyebwa, acteur influent de la société civile, alerte sur l’urgence de la situation. « Nous assistons à une spirale de violences qui risque de dégénérer en conflit plus large si des actions concrètes ne sont pas rapidement entreprises ».
Cette crise sécuritaire autour de Luhihi n’est malheureusement pas un phénomène isolé. Le site minier a connu plusieurs incidents graves ces derniers mois, dont une opération éclair de pillage menée par des hommes armés en août 2025. Ces attaques répétées mettent en lumière le déficit sécuritaire chronique qui caractérise les zones riches en ressources minières du Sud-Kivu.
La fermeture du site par le M23 pose également des questions fondamentales sur la gouvernance des ressources naturelles dans les zones sous contrôle rebelle. Les activités du M23 à Luhihi et leurs conséquences sur la sécurité locale interrogent la capacité des différents acteurs à assurer la protection des civils.
La population, prise entre le marteau de l’insécurité et l’enclume de la précarité économique, appelle à une intervention urgente des autorités compétentes. Le rétablissement de la sécurité dans cette région stratégique apparaît comme une condition indispensable à la reprise des activités économiques et à la stabilisation sociale.
La crise de Luhihi sert de révélateur aux défis sécuritaires plus larges auxquels fait face le Sud-Kivu. Elle démontre comment la fermeture d’un site économique vital peut engendrer des conséquences en cascade sur la sécurité des populations avoisinantes. La résolution de cette crise nécessitera une approche multidimensionnelle combinant sécurité, développement économique et dialogue communautaire.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net