Les espoirs nés de la déclaration commune du 23 avril à Doha se sont évaporés comme mirage dans le désert qatari. Trois semaines après ce semblant de percée diplomatique, les négociations entre le gouvernement congolais et l’AFC/M23 sont retombées dans une impasse inquiétante. Le troisième round de discussions, tenu début mai, n’a produit aucun résultat tangible, poussant les délégués rebelles à regagner Goma, les mains vides et les rancœurs pleines.
Quel jeu se joue réellement autour de cette table de négociation ? Selon un diplomate étroitement impliqué, le processus tourne au « dialogue de sourds », où chaque camp campe sur des positions maximalistes. Kinshasa conditionne toute avancée à un retrait AFC/M23 immédiat des territoires occupés dans le Nord-Kivu, tandis que les rebelles exigent en préalable la libération de leurs cadres emprisonnés. Cette rigidité mutuelle transforme les pourparlers en champ de bataille diplomatique stérile.
La mécanique des négociations RDC M23 révèle d’ailleurs une défiance profonde : sur 32 jours de présence à Doha, seulement quatre réunions directes ont pu être organisées. Le reste s’est déroulé par médiation interposée, comme si la simple confrontation des regards était devenue insoutenable. Dans ce climat délétère, le retour précipité des négociateurs rebelles à Goma, officiellement pour « consultations », ressemble fort à une mise en demeure.
À Kinshasa, l’irritation grandit face à ce qui est perçu comme des manœuvres dilatoires. Certains délégués congolais durcissent le ton, exigeant des actes concrets avant de reprendre le fil des discussions. Mais l’élément le plus explosif reste la présence de l’ancien président Joseph Kabila à Goma. Les cercles du pouvoir y voient une tentative de réactiver des réseaux d’influence dans les milieux sécuritaires, accusant l’ex-chef de l’État de souffler sur les braises de la crise politique pour fragiliser le régime Tshisekedi.
Face à cette paralysie, la médiation Union africaine tente désespérément d’empêcher l’effondrement du processus. Faure Gnassingbé, envoyé spécial, multiplie les consultations à Kinshasa : après Martin Fayulu et les leaders religieux, il s’est entretenu avec Bintou Keita de la MONUSCO avant une ultime rencontre avec Félix Tshisekedi. Le ministre togolais des Affaires étrangères œuvre en coulisses pour créer un « climat propice », mais peut-il réellement inverser la dynamique d’enlisement ?
La question centrale demeure : quelle puissance parviendra à briser cette glaciation ? Si Washington observe depuis l’ombre, c’est vers les capitales africaines que se tournent les derniers espoirs. Pourtant, le temps joue contre la paix : chaque jour perdu dans l’impasse Doha renforce les lignes de front et radicalise les positions. Le risque est désormais celui d’une pérennisation du conflit, où les armes finiraient par remplacer définitivement la parole. La crédibilité de la diplomatie continentale se joue sur ce dossier brûlant, alors que la population du Kivu, otage de ces calculs politiques, attend un signe tangible d’apaisement.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net