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Goma sous le M23 : le monopole des déchets ménagers crée la polémique

La décision des autorités du M23 de restructurer la gestion des déchets ménagers à Goma suscite un vif débat sur les orientations économiques et environnementales dans cette ville stratégique du Nord-Kivu. En confiant le monopole de la collecte des ordures à deux sociétés, Vision Net et Shap, au détriment d’une vingtaine d’entreprises privées historiques, le mouvement armé relance une question cruciale : la centralisation étatique est-elle synonyme de progrès ou de régression pour les populations ?

Selon les responsables du M23, cette mesure vise à « rétablir le rôle de l’État dans l’assainissement », arguant d’une nécessaire régulation face à un secteur jugé trop fragmenté. Pourtant, cette rhétorique étatique contraste avec les réalités du terrain. Les entreprises évincées, comme la société BSC, dénoncent une rupture brutale avec des méthodes éprouvées depuis 2008, période où Goma s’était imposée comme un modèle provincial grâce à des initiatives privées innovantes. « On nous retire nos outils pour replonger la ville dans les pratiques d’un autre siècle », lance un gérant sous couvert d’anonymat.

Derrière les discours se cachent des enjeux économiques palpables. La taxe d’assainissement obligatoire – oscillant entre 2 et 5 dollars par ménage – soulève des interrogations sur sa redistribution. Les ménages, déjà éprouvés par des années de conflits, redoutent une double peine : payer plus pour des services dont la qualité reste incertaine. Avec une densité de 17 378 habitants au km², la capacité des deux sociétés désignées à couvrir l’ensemble des 125,7 km² de la ville relève-t-elle de l’utopie ?

Les conséquences sociales s’annoncent tout aussi lourdes. Près de vingt employés de BSC sont désormais en chômage technique, symbole d’une vague de précarité touchant des centaines de familles. Ces entreprises privées ne représentaient pas seulement un service, mais aussi un vivier d’innovation : recyclage, compostage, ou création de biogaz. Autant de projets aujourd’hui suspendus, au risque de fragiliser un écosystème entrepreneurial pourtant vital pour l’économie locale.

Les autorités du M23 persistent à défendre leur choix, évoquant une « harmonisation nécessaire dans un contexte post-conflit ». Mais cette logique centralisatrice interroge. En confisquant un secteur clé à des acteurs privés, ne risque-t-on pas de décourager les investissements futurs, pourtant indispensables à la reconstruction du Nord-Kivu ? La gestion des déchets, loin d’être anodine, cristallise ici un clivage profond entre volonté de contrôle politique et impératifs de développement durable.

L’avenir dira si ce monopole sur l’assainissement parvient à relever le défi de propreté urbaine. Mais d’ores et déjà, une chose est certaine : en sacrifiant des dynamiques locales au nom de la centralisation, le M23 joue une partie risquée. Entre méfiance populaire et tensions économiques, Goma pourrait bien devenir le théâtre d’un nouveau front – moins visible, mais tout aussi déterminant pour sa stabilité.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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