Alors que la République Démocratique du Congo poursuit sa quête de stabilisation, le ministère de la Formation professionnelle ouvre un nouveau chapitre stratégique. Lors de la 42e réunion du Conseil des ministres, Marc Ekila a obtenu le feu vert gouvernemental pour trois initiatives phares. Au cœur de ce dispositif : un partenariat inédit avec le Programme de Désarmement, Démobilisation, Relèvement Communautaire et Stabilisation (P-DDRCS).
Signé le 17 avril 2025, ce protocole d’accord vise à transformer les ex-combattants en acteurs économiques. « L’objectif est clair : créer des passerelles entre la démobilisation et l’employabilité », explique un collaborateur du ministère. Des formations en mécanique, agriculture ou électricité seront dispensées dans des centres spécialisés. Une approche qui soulève des questions : ces cursus suffiront-ils à enrayer la récidive violente dans les provinces en crise ?
Deuxième pilier du plan Ekila : la création d’une brigade de réflexion sur les qualifications avancées. Ce groupe de travail, composé d’universitaires et de professionnels, doit combler un vide criant. « Actuellement, moins de 15% des diplômés des centres techniques trouvent un emploi correspondant à leur spécialité », déplore un formateur de Kinshasa. Le projet prévoit des certifications reconnues par l’État, en attendant la construction des Instituts de Hautes Études Professionnelles.
La troisième annonce concerne l’ENFEP 2025, l’Examen National de Fin d’Études Professionnelles. Cette session marquera un tournant avec l’introduction de nouvelles filières numériques. « C’est une révolution silencieuse », s’enthousiasme une examinatrice de Lubumbashi. « En 2024, seuls 23 centres sur 178 disposaient d’ateliers informatiques fonctionnels. Les défis logistiques restent immenses. »
Derrière ces réformes se profile une ambition plus vaste : redéfinir le capital humain congolais. Le P-DDRCS, structure clé du processus de paix, devient ainsi un laboratoire social. Son directeur régional au Kasaï confie : « Nous formons des ferronniers qui reconstruiront les écoles détruites. C’est un cercle vertueux. » Mais sur le terrain, les moyens manquent. Le budget alloué à la formation professionnelle représente moins de 2% du PIB.
Marc Ekila mise sur des partenariats public-privé pour y remédier. Sa « Foire du Capital Humain », lancée en 2023, a déjà permis de former 12 000 jeunes dans des secteurs porteurs. Un modèle à dupliquer ? « Absolument », répond le ministre. « Chaque certificat délivré est un fusil déposé. » Une formule choc qui résume le pari congolais : faire de l’apprentissage un rempart contre l’instabilité.
Reste à savoir comment ces mesures seront déployées dans les zones reculées. À Beni, un chef de centre alerte : « Sans carburant pour les groupes électrogènes, nos machines à coudre restent muettes. » Le succès de ce plan dépendra de sa concrétisation opérationnelle. Une équation complexe que le gouvernement devra résoudre avant les prochaines échéances électorales.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: Actualite.cd