La planète retient son souffle. Trois géants des forêts tropicales viennent de sceller une alliance historique qui pourrait révolutionner la finance climatique mondiale. La République Démocratique du Congo, l’Indonésie et le Brésil, gardiens de plus de la moitié des forêts tropicales restantes sur Terre, unissent leurs forces pour créer un cartel environnemental sans précédent.
Inspiré du modèle de l’OPEP pétrolière, ce nouveau bloc écologique entend peser de tout son poids sur le marché carbone mondial. Une stratégie audacieuse qui vise à corriger une injustice fondamentale : pourquoi les pays qui préservent les poumons verts de la planète ne seraient-ils pas rémunérés à la hauteur des services environnementaux essentiels qu’ils rendent à l’humanité tout entière ?
La scène s’est jouée à Belém, épicentre des négociations climatiques, ce samedi 15 novembre. Dans une salle de conférence où l’air était chargé d’histoire en train de s’écrire, la ministre congolaise de l’Environnement, la Professeure Marie Nyange Ndambo, et son homologue indonésien Hanif Faisol Nurofiq ont officialisé leur convergence stratégique. Leur objectif commun ? Construire un front uni capable de défendre une valorisation équitable des écosystèmes forestiers.
Le marché carbone représente aujourd’hui un enjeu financier colossal, mais les pays forestiers en captent une part dérisoire. Cette initiative tripartite RDC-Indonésie-Brésil pourrait bien changer la donne en créant un pôle de négociation capable de rivaliser avec les grandes puissances économiques. Imaginez : près de 80% des forêts tropicales mondiales parlant d’une seule voix pour défendre leur droit à un développement sobre en carbone.
Les forêts du Congo, deuxième massif forestier tropical au monde après l’Amazonie, jouent un rôle climatique crucial. Pourtant, leur préservation repose encore trop souvent sur la bonne volonté internationale et des financements aléatoires. Le bassin du Congo, véritable trésor de biodiversité, régule les pluies jusqu’en Afrique de l’Est et constitue un puits de carbone vital dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Mais comment expliquer que ces écosystèmes essentiels à l’équilibre planétaire ne soient pas valorisés à leur juste prix ? Le marché volontaire du carbone reste aujourd’hui un terrain de jeu déséquilibré, où les pays du Nord imposent trop souvent leurs conditions aux nations du Sud. Le bloc RDC-Indonésie-Brésil entend renverser cette dynamique en créant un standard commun de valorisation des crédits carbone.
Cette alliance inédite pourrait également harmoniser les politiques de conservation forestière entre les trois continents. Partage d’expertise, développement de technologies de monitoring satellitaire, création de mécanismes de vérification communs : les synergies sont immenses. Les services environnementaux fournis par ces forêts – stockage du carbone, régulation du cycle de l’eau, préservation de la biodiversité – méritent enfin une reconnaissance financière à la hauteur de leur importance écologique.
La route sera longue et semée d’embûches. Les négociations climatiques internationales ressemblent souvent à un champ de bataille où les intérêts économiques immédiats l’emportent sur la raison environnementale. Pourtant, l’urgence climatique ne nous laisse plus le choix : il faut inventer de nouveaux modèles de coopération Nord-Sud qui reconnaissent la valeur réelle des écosystèmes.
Le succès de cette initiative dépendra de la capacité des trois pays à maintenir leur unité face aux pressions internationales. Il faudra également développer des mécanismes transparents garantissant que les revenus du carbone bénéficient réellement aux communautés locales et aux programmes de conservation. La crédibilité de ce futur cartel vert en dépend directement.
Alors que la déforestation continue de ravager les derniers sanctuaires forestiers de la planète, cette alliance historique pourrait marquer un tournant décisif dans la gouvernance climatique mondiale. Les poumons verts de la Terre s’organisent pour faire entendre leur voix. L’heure est venue de leur donner les moyens de leur ambition.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: Actualite.cd
