Un drame sécuritaire a une nouvelle fois endeuillé le territoire de Shabunda, dans la province du Sud-Kivu. Un commerçant ambulant membre de la Mutuelle Bashi-Bahavu a été exécuté de sang-froid par un général autoproclamé du groupe Wazalendo. L’incident s’est produit le jeudi 6 novembre dans le groupement Batale, précisément au village Mulongo, plongeant la communauté locale dans la consternation.
Comment un simple billet de banque étranger peut-il transformer un citoyen en cible mortelle ? La question hante désormais les commerçants ambulants de la région. Selon le président de leur association, Gentil Mulume Oderhwa, la tragédie trouve son origine dans la découverte d’un billet de 1 000 francs rwandais sur la personne de la victime. Un détail anodin devenu prétexte à une accusation gravissime : l’espionnage.
L’arrestation remontait au 24 octobre dernier. Le général Nganda et son acolyte S2 Kibamba, tous deux figures influentes du mouvement Wazalendo à Shabunda, avaient interpellé le jeune commerçant. Malgré les tentatives de médiation de sa communauté, malgré les explications répétées sur la nature purement commerciale de ses activités, l’étau s’était resserré autour de l’homme d’affaires Shi.
La Mutuelle Bashi-Bahavu avait pourtant cru trouver une issue négociée. Plus d’un million cinq cent mille francs congolais avaient été versés aux ravisseurs en échange d’une promesse de libération. Une transaction qui devait sauver une vie, mais qui n’a servi qu’à enrichir les bourreaux. Après encaissement des fonds, les Wazalendo ont brutalement rompu leur engagement.
L’escalade fatale s’est produite dans la brousse de Mulongo. Cirhuza, le commerçant ambulant dont le seul crime était de pratiquer son métier, a été froidement abattu puis enterré sommairement par le général Nganda en personne. Une exécution extrajudiciaire qui révèle l’impunité régnant dans certaines zones du Sud-Kivu.
La violence à Shabunda prend-elle des proportions incontrôlables ? Les témoignages recueillis sur place dressent un tableau alarmant. Différentes couches sociales expriment leur consternation face à cette spirale meurtrière. L’absence de réaction des autorités politico-administratives et judiciaires alimente un sentiment d’abandon parmi les populations civiles.
« Nous sommes complètement abandonnés », déplore Gentil Mulume Oderhwa, dont la voix porte la colère et l’amertume de toute une communauté. Son appel à une intervention gouvernementale urgente résonne comme un cri d’alarme dans un territoire où la loi des armes semble primer sur l’État de droit.
L’assassinat de ce commerçant ambulant interroge sur le contrôle réel des groupes armés dans la région. Les Wazalendo, présentés comme des forces d’autodéfense, montrent-ils ici leur vrai visage ? La frontière entre protection et prédation semble dangereusement mince à Shabunda.
Cette affaje soulève également la question de la sécurité des petits commerçants, particulièrement vulnérables dans les zones de conflit. La Mutuelle Bashi-Bahavu, qui représente ces acteurs économiques essentiels à la survie des communautés rurales, se retrouve démunie face à des milices mieux armées qu’elle.
Le drame de Batale s’inscrit dans une série de violences attribuées aux Wazalendo dans le Sud-Kivu. Chaque incident de ce type érode un peu plus la confiance des populations envers les institutions censées les protéger. L’urgence d’une réponse coordonnée des autorités provinciales et nationales n’a jamais été aussi criante.
La balle est désormais dans le camp de la justice congolaise. Saura-t-elle traduire en actes les demandes de justice des commerçants de Shabunda ? L’impunité dont bénéficient les auteurs de ces exactions constituera-t-elle un précédent dangereux ou marquera-t-elle le début d’une prise de conscience salutaire ?
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
