Dans la base militaire de Tshanzu, reconnue comme centre de formation des combattants de l’AFC/M23, une cérémonie militaire a marqué la fin d’un cycle d’entraînement intensif. Des jeunes filles et jeunes hommes en treillis verts, baïonnette au canon, ont défilé le 1er octobre dernier, clôturant un programme incluant exercices de tir, techniques de combat rapproché et arts martiaux.
Le coordonnateur militaire de l’AFC/M23, Sultani Makenga, s’est adressé aux nouvelles recrues dans un discours particulièrement offensif. « Notre armée se bat pour le changement dans ce pays », a-t-il déclaré, accusant le gouvernement de Kinshasa dirigé par Félix Tshisekedi d’avoir « détruit » le pays et transformé la RDC en « propriété privée ».
Le message aux nouvelles recrues était sans équivoque : elles seront déployées pour soutenir les combattants déjà en position et participer au « renversement de ce mauvais régime ». Makenga a affirmé que « tous les congolais dans leur ensemble veulent être libérés », présentant cette mission comme la raison d’être du mouvement M23.
Cette démonstration de force ne constitue pas un cas isolé. Deux semaines plus tôt, le 14 septembre 2025, environ 7.400 personnes avaient été présentées au camp militaire de Rumangabo. Parmi elles figuraient d’anciens militaires des FARDC, des combattants Wazalendo et d’autres éléments formés par l’AFC/M23 pendant six mois.
Bertrand Bisimwa, coordonnateur adjoint de l’AFC/M23, avait alors annoncé que « la Révolution vient d’atteindre sa phase déterminante ». Il avait martelé que « la libération du pays est l’unique leitmotiv de notre nouvel engagement », appelant à une « gouvernance redevable » et une « classe politique disciplinée ».
Ce renforcement militaire continu du M23 a été documenté dans un rapport du secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres daté du 19 septembre. Le document officiel confirme que « le recrutement volontaire et forcé s’est poursuivi dans l’ensemble des zones tenues par le M23 ».
Le rapport onusien révèle des chiffres alarmants : « au moins 1.454 personnes arrêtées arbitrairement ont été emmenées de force dans des camps situés dans le territoire de Rutshuru pour y suivre un entraînement militaire ». Des destructions d’habitations et de commerces civils ainsi que des déplacements forcés de populations ont également été enregistrés.
La situation sécuritaire dans le Nord-Kivu continue de se dégrader. Le rapport documente des opérations conjointes entre le M23 et la Force de défense rwandaise contre les FDLR. L’une de ces opérations, dans la chefferie de Bwisha, a conduit à « au moins 335 civils massacrés, dont 52 femmes et 24 enfants » entre le 9 et le 28 juillet.
Ce bilan humain représente « l’un des plus lourds jamais enregistrés dans ce type d’attaques depuis la résurgence du M23 en 2022 », selon le secrétaire général de l’ONU. Cette escalade des violences intervient dans un contexte où les civils paient le prix fort des affrontements entre différents groupes armés.
La nouvelle démonstration militaire du M23 à Tshanzu survient à un moment particulièrement sensible : la reprise des négociations entre l’AFC/M23 et le gouvernement congolais est annoncée pour la semaine du 6 octobre à Doha. Cette coïncidence calendaire interroge sur la réelle volonté de paix des différentes parties.
Le processus de formation militaire Tshanzu continue ainsi de produire de nouveaux combattants, alimentant le conflit Nord-Kivu qui déchire l’est de la RDC depuis des années. Les récentes déclarations des responsables du M23, combinées aux rapports documentant les violences, dessinent un tableau sombre de la situation sécuritaire dans la région.
Alors que les négociations de Doha approchent, la communauté internationale observe avec inquiétude cette escalade militaire. La formation de nouvelles recrues et le discours belliqueux des responsables du M23 jettent une ombre sur les perspectives de paix dans la région.
Quel impact cette démonstration de force aura-t-elle sur les négociations à venir ? Les parties parviendront-elles à trouver un terrain d’entente malgré les récentes provocations ? La réponse à ces questions déterminera l’avenir de millions de congolais pris au piège de ce conflit qui semble s’éterniser.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
