Dans l’Est de la République démocratique du Congo, une nouvelle forme de prédation économique frappe des populations déjà vulnérables. Des individus sans scrupules se font passer pour des faux agents humanitaires RDC, exploitant la détresse des communautés pour soutirer de l’argent sous de faux prétextes.
« Ils sont venus chez moi en disant qu’ils préparaient une distribution du PAM et de Caritas », témoigne une habitante de Bukavu qui a préféré garder l’anonymat. « Ils ont demandé 5.000 francs congolais pour m’enregistrer, promettant que je recevrais un colis alimentaire la semaine suivante. J’ai donné ce que j’avais, mais personne n’est jamais revenu. »
Ce récit poignant illustre le modus operandi de ces escrocs qui opèrent en toute impunité dans les provinces du Nord et Sud-Kivu. Le phénomène des escroqueries aide humanitaire prend une ampleur inquiétante, selon les organisations légitimes qui tentent de venir en aide aux populations affectées par les conflits armés.
Comment ces fraudeurs parviennent-ils à abuser ainsi la confiance des communautés ? La réponse réside dans leur connaissance fine du terrain et leur capacité à imiter les procédures des vraies organisations. Ils utilisent du matériel qui semble officiel, des formulaires d’enregistrement et même de fausses cartes d’identité.
La Caritas Sud-Kivu a été la première à tirer la sonnette d’alarme fin juillet 2025. Son porte-parole, l’Abbé Louis Pasteur Rudahingwa, dénonce avec vigueur ces pratiques : « Ces individus n’ont aucun lien avec nous. L’aide humanitaire doit rester gratuite et accessible à tous ceux qui en ont besoin. »
Deux semaines plus tard, c’est au tour de l’APC Nord-Kivu de subir une usurpation d’identité. Un certain Bagumba se faisait passer pour un de leurs agents à Goma, proposant de fausses offres d’emploi et exigeant des paiements pour un prétendu projet « Muhangano ».
Ces cas de fraude humanitaire Est Congo révèlent une triste réalité : là où la misère s’installe, la malhonnêteté trouve toujours un terrain fertile. Les populations, déjà éprouvées par des années de conflit et de précarité, se retrouvent doublement victimes – de la violence et de l’exploitation de leur détresse.
« Ces escroqueries ne volent pas seulement l’argent des plus pauvres, elles volent aussi leur espoir », analyse un travailleur social de Goma. « Quand des gens qui ont tout perdu donnent leur dernier franc pour une promesse d’aide qui n’arrivera jamais, c’est toute leur confiance dans le système humanitaire qui s’effondre. »
Les conséquences de ces agissements sont multiples : outre le préjudice financier direct, elles créent une méfiance généralisée envers les véritables organisations humanitaires, compromettant ainsi l’accès à l’aide pour ceux qui en ont réellement besoin.
Face à cette situation, les ONG légitimes multiplient les mises en garde. Elles rappellent que leurs services sont toujours gratuits, que leurs recensements ne nécessitent aucun paiement et que toutes leurs offres d’emploi sont publiées officiellement sur leurs sites internet.
Mais dans une région où l’accès à l’information reste limité et où le taux d’analphabétisme est élevé, la vigilance alone ne suffit pas. Les autorités locales et la police congolaise sont appelées à intensifier leurs efforts pour identifier et poursuivre ces fraudeurs qui profitent de la vulnérabilité des populations.
La question qui persiste est : jusqu’à quand ces pratiques pourront-elles continuer impunément ? Dans l’Est de la RDC, où les défis humanitaires sont immenses, chaque franc détourné par ces escrocs représente une ration alimentaire en moins pour une famille affamée, un médicament qui ne sera pas distribué, un enfant qui ne recevra pas l’assistance dont il a besoin.
Alors que la communauté internationale se mobilise pour venir en aide aux populations de l’Est congolais, il devient urgent de protéger ces efforts des prédateurs qui cherchent à les détourner à leur profit. La crédibilité de l’action humanitaire et la confiance des bénéficiaires en dépendent.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
