Le marché du ciment gris à Beni, au Nord-Kivu, connaît une révolution silencieuse. En l’espace de quelques jours, le prix ciment Beni a chuté de façon spectaculaire, passant de 13,5 dollars américains le sac à une fourchette comprise entre 9,8 et 12 dollars. Cette baisse ciment Nord-Kivu, qui dépasse les 20% sur certains points de vente, agit comme un électrochoc sur l’économie régionale, redonnant espoir aux constructeurs et aux ménages.
À l’origine de cette transformation : la suppression drastique des frais frontière Kasindi illégalement perçus à Kasindi-Lubiriha, principal point de transit des marchandises destinées à Beni, Butembo et Lubero. Le gouverneur du Nord-Kivu, le général-major Evariste Kakule Somo, a pris le taureau par les cornes en éradiquant ces barrières fiscales parallèles qui grevaient la compétitivité des opérateurs économiques. Comme le souligne Eugène Kakule Matembela, président de l’Association congolaise des commissionnaires agréés en douane : “Ces perceptions illicites sans preuve de paiement constituaient une hémorragie financière pour les importateurs, répercutée in fine sur les consommateurs”.
La mécanique de cette baisse mérite analyse. Kasindi fonctionnait comme un goulot d’étranglement où s’accumulaient des coûts opaques – jusqu’à 3,7 dollars par sac de ciment selon les estimations des grossistes. En assainissant ce point nodal du commerce transfrontalier, les autorités provinciales ont coupé le robinet à une inflation artificielle qui minait la croissance. Résultat immédiat : les transporteurs réduisent leurs marges de risque, les distributeurs ajustent leurs stocks et l’offre se fluidifie. Cette décrue des prix agit comme un catalyseur pour l’économie Beni, où le secteur du bâtiment représente près de 18% de l’activité formelle.
Sur le terrain, les effets concrets se mesurent déjà. À Mavivi, le chantier de l’aéroport – projet structurant pour la région – bénéficie directement de cette dynamique. Les responsables du site confient que la baisse des coûts des matériaux pourrait accélérer de 15% le calendrier des travaux. Plus globalement, cette embellie relance la machine des petits investissements : constructions résidentielles, réhabilitations de boutiques ou projets communautaires retrouvent une viabilité financière. Comment ne pas voir dans cette correction des prix un ballon d’oxygène pour une population confrontée à des années de surcoûts ?
Pour autant, cette embellie conjoncturelle soulève des questions cruciales. Sa pérennité dépendra de la capacité des autorités à maintenir la pression contre toute résurgence de taxes fantômes. Certains observateurs pointent aussi le besoin d’accompagner cette mesure par une modernisation des infrastructures logistiques – le mauvais état de la RN4 reste un facteur limitant. La vraie victoire, comme le rappelle Kakule Matembela, consistera à transformer cette décision ponctuelle en “norme durable pour le développement économique”.
À moyen terme, cette baisse historique pourrait réécrire les équilibres régionaux. Avec un sac de ciment désormais aligné sur les standards nationaux, Beni se positionne en hub attractif pour les investisseurs du bâtiment. Le projet de construction Mavivi devient le symbole de cette mutation – sa réussite démontrera si le Nord-Kivu peut transformer ses avantages géostratégiques en levier de développement pérenne. Reste à savoir si d’autres provinces sauront s’inspirer de ce cas d’école dans la lutte contre les entraves économiques informelles.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net