Imaginez des milliers de familles congolaises dormant à même la terre, les enfants grelottant sous la rosée nocturne d’Uvira. « Nous sommes comme des animaux sauvages, exposés à toutes les maladies », murmure une mère tenant son nourrisson fiévreux. Ce cauchemar est la réalité quotidienne de plus de 10 000 déplacés dans le territoire d’Uvira, au Sud-Kivu, selon l’alerte lancée par Mwami Romain Lenge, chef de la chefferie de Bavira.
La crise humanitaire à Uvira atteint un seuil critique : ces populations, fuyant les combats du M23 à Goma et Bukavu, se retrouvent sans accès aux soins médicaux ni à l’aide d’urgence. « Cette agression entraîne des déplacements massifs », déplore Romain Lenge, décrivant des familles entières survivant sans abri, buvant une eau contaminée qui propage le choléra et la dysenterie. Comment une région déjà vulnérable peut-elle absorber un tel afflux ?
L’urgence à Uvira révèle une faille béante dans la chaîne de solidarité nationale. Les déplacés du Sud-Kivu errent dans un no man’s land humanitaire : aucun centre d’accueil, pas de kits de survie, des dispensaires surchargés refusant de nouveaux patients. La guerre du M23 déplace toujours plus de civils, créant un effet domino qui submerge les communautés hôtes. « Leur prise en charge pose un sérieux problème », insiste le chef traditionnel, dont la voix tremble d’indignation.
Derrière les statistiques, des drames humains s’accumulent. Des vieillesses abandonnées sous des arbres, des femmes accouchant dans des champs, des adolescents recrutés par des milices par désespoir. Cette crise humanitaire à Uvira n’est pas qu’un défi logistique : c’est une bombe sanitaire et sociale à retardement. Les organisations sur place tirent la sonnette d’alarme depuis des semaines, mais l’aire reste sinistrée.
Face à l’inaction, Romain Lenge lance un appel pressant : « Nous en appelons aux autorités publiques et aux humanitaires ». Son cri du cœur résonne comme une question brûlante : jusqu’où devra-t-on compter les morts avant que Kinshasa ne réagisse ? Les déplacés du M23 ne sont pas des statistiques, mais des congolais jetés dans la précarité par un conflit qui n’en finit pas.
L’urgence à Uvira exige plus qu’une aide ponctuelle : elle nécessite un plan de relocalisation durable et une sécurisation des zones de conflit. Sans cela, cette crise des déplacés risque de s’ancrer dans la durée, hypothéquant l’avenir de toute une génération. La réponse à cet appel sera le véritable test de notre humanité collective.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net