Le ministre intérimaire de la Justice, Samuel Mbemba, a défini ce lundi 23 juin 2025 la nouvelle orientation pénale du gouvernement, privilégiant la justice transitionnelle au détriment du dialogue politique préconisé par le Comité National de Suivi de l’Accord de Saint-Sylvestre (CNSA). Lors d’une conférence de presse tenue à Kinshasa, l’autorité judiciaire a catégoriquement rejeté les propositions d’amnistie et de libérations des détenus politiques avancées par ce comité.
Selon les déclarations officielles, la politique pénale gouvernementale repose désormais sur les quatre piliers incontournables de la justice transitionnelle en RDC : l’établissement rigoureux des faits, l’engagement de poursuites judiciaires contre les auteurs de violations, l’indemnisation des victimes identifiées, et la réforme des institutions. « Le standard international exige que la vérité soit établie par voie judiciaire lorsqu’il y a eu des violations massives des droits des populations civiles », a martelé Samuel Mbemba, soulignant l’incompatibilité entre les demandes d’arrêt des procédures et les obligations internationales de la RDC.
Cette position ferme constitue un désaveu cinglant des recommandations du CNSA qui préconisait, dans le cadre de l’accord Saint-Sylvestre, la libération des prisonniers politiques, la levée des restrictions de déplacement et l’abandon pur et simple des poursuites judiciaires. Le ministre a qualifié ces propositions d’inacceptables, affirmant qu’elles sacrifieraient les droits des victimes sur l’autel des intérêts politiques partisans. Faut-il privilégier l’impunité des puissants au détriment des civils lésés ? La réponse gouvernementale ne laisse place à aucune ambiguïté.
Concrètement, des instructions formelles ont été adressées aux parquets des cours militaire et civile afin d’accélérer les procédures en cours dans le strict respect des normes légales. « Ces courriers ne constituent pas des injonctions, mais rappellent l’obligation de mener à terme les actions pénales engagées », a précisé le ministre, tout en invitant la société civile à soumettre des propositions alignées sur les standards internationaux en matière de justice transitionnelle. Cette mesure implique la poursuite inéluctable des procès politiques au Congo, notamment ceux concernant des violations graves commises durant les conflits.
L’annonce crée une tension palpable avec le CNSA, dont le communiqué exigeait précisément l’arrêt des « restrictions judiciaires » contre les acteurs politiques. Le gouvernement oppose ainsi une fin de non-recevoir à toute tentative de suspendre les enquêtes pour favoriser un dialogue national. Cette inflexibilité pénale s’inscrit dans un contexte où les dossiers sensibles impliquant des figures politiques influentes risquent de connaître des développements judiciaires imminents.
Il a été confirmé que le processus d’indemnisation des victimes ne pourra s’enclencher qu’après l’identification formelle des personnes lésées et la détermination juridique des préjudices subis, deux étapes indissociables des procédures en cours. Cette approche méthodique, bien que potentiellement source de conflits politiques immédiats, se veut conforme aux meilleures pratiques en matière de justice transitionnelle. La question centrale demeure : cette rigueur judiciaire parviendra-t-elle à concilier paix sociale et exigence de vérité dans un pays marqué par des décennies de violences ?
Les prochaines semaines permettront d’observer la traduction concrète de cette politique pénale gouvernementale dans le traitement des dossiers sensibles par les juridictions compétentes. L’efficacité des parquets civils et militaires à mener ces procédures complexes sous pression politique constituera un test décisif pour la crédibilité de cette nouvelle orientation.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd