Le chemin de poussière ocre serpente entre les hutres reconstruites à la hâte. Dans le groupement de Vandavilemba, les rires des enfants ont remplacé le silence des mois d’exode. « Trois mois sans attaques des ADF, c’est un miracle après l’enfer vécu », confie Dieudonné Malangai, président de la société civile locale, en scrutant l’horizon forestier de la chefferie de Walese Vonkutu. Comme 60% des déplacés de cette zone du territoire d’Irumu, en Ituri, des milliers de familles osent enfin revenir sur leurs terres abandonnées durant la fuite face aux rebelles.
Cette renaissance fragile, portée par une accalmie sécuritaire inédite, doit beaucoup aux opérations conjointes des armées congolaise et ougandaise. Les FARDC et l’UPDF ont progressivement repoussé les groupes ADF qui semaient la terreur dans cette région frontalière du Nord-Kivu. Mais comment consolider ce retour lorsque les souvenirs des massacres restent vifs dans les mémoires ? « Nous supplions les autorités de maintenir les dispositifs militaires », implore Malangai, conscient que la sécurité reste le cordon ombilical de cette reconquête.
L’autre pilier de cette résilience émerge des travaux titanesques sur l’axe Komanda-Luna. Sous la houlette du gouvernement provincial et du génie militaire ougandais, cette artère vitale reliant l’Ituri au Nord-Kivu renaît de ses gravats. « Sans cette route réhabilitée, comment imaginer ravitailler nos villages ou évacuer un malade ? », s’interroge une commerçante rencontrée près des chantiers. Cette voie symbolise désormais le lien retrouvé entre des communautés jadis isolées par la guerre.
Pourtant, derrière l’espoir renaissant, la précarité guette chaque foyer. Dans les centres de santé aux étagères vides, le personnel médical montre des registres immaculés : « Pas un comprimé de paracétamol, pas une seringue depuis des semaines », déplore une infirmière. La crise humanitaire en Ituri frappe de plein fouet ces retournés qui doivent choisir entre reconstruire leur case ou soigner leur enfant fiévreux. Les organisations d’aide brillent par leur absence dans ces villages pourtant accessibles désormais.
Les déplacés de Walese Vonkutu ont franchi le pas du retour, mais leur courage se heurte à une réalité implacable : sans eau potable, sans semences agricoles, sans médicaments, comment bâtir l’avenir ? Les appels lancés par les acteurs locaux résonnent comme un ultimatum face à la communauté internationale. Cette percée humaine et sécuritaire en Ituri, arrachée de haute lutte, ne survivra pas à l’indifférence humanitaire. La route est ouverte, mais le chemin vers la paix durable reste à paver.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
