L’audience du procès en flagrance de dix individus impliqués dans l’homicide de Kabasele Wampanga, éminent cadre de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), s’est ouverte ce lundi 9 juin 2025 devant le tribunal de grande instance de Kinshasa/Matete. Cette procédure judiciaire, attendue avec vigilance par les observateurs politiques, a immédiatement été marquée par un retrait retentissant de la partie civile.
Dès l’identification des prévenus, la famille de la victime, représentée par son avocat Maître Sylvain Mutombo, a notifié son désistement de la procédure en cours. Cette décision radicale serait motivée par la conviction que les conditions garantissant un procès équitable et l’établissement de la vérité ne seraient pas réunies. « Les clients ont demandé que les avocats se retirent jusqu’à ce que le procureur général près la Cour de cassation instruise le dossier », a déclaré Me Mutombo aux médias, évoquant la crainte d’un « procès théâtral » à l’image de l’affaire Chebeya.
Cette défiance institutionnelle s’accompagne d’une révélation majeure : une plainte aurait été déposée auprès du parquet général près la Cour de cassation de la RDC visant directement Augustin Kabuya, secrétaire général national de l’UDPS. L’épouse du défunt, présente à l’audience, a publiquement accusé ce dernier d’être le commanditaire intellectuel du meurtre : « Augustin Kabuya est à la base du décès de mon mari […] On a tué mon mari parce qu’il soutenait Deo Bizibu ». Ces allégations graves plongent leurs racines dans les luttes factionnelles au sein du parti présidentiel.
Le drame trouve en effet son origine dans les tensions persistantes entre factions rivales de l’UDPS. Kabasele Wampanga, décédé des suites de violences après une agression liée à ces conflits internes, avait déjà été incarcéré en 2024 à la prison de Makala pour des motifs similaires. Comment expliquer que ces déchirements fratricides au sein de la formation du président Félix Tshisekedi dégénèrent systématiquement en violence extrême ? La passivité perçue des plus hautes instances du parti face à ces rivalités entre les courants Kabuya et Bizibu interroge sur les mécanismes de régulation interne.
L’ouverture de ce procès en flagrance au tribunal de Matete, procédure accélérée réservée aux crimes récents et flagrants, est désormais compromise par le retrait des parties civiles. Les magistrats devront statuer sur la poursuite des débats pénaux concernant les dix accusés présents, tandis que la plainte déposée à la Cour de cassation ouvre un front judiciaire parallèle de plus haute instance. La décision du parquet général près la Cour suprême quant à l’opportunité d’engager des poursuites contre M. Kabuya sera déterminante pour l’évolution de cette affaire politico-judiciaire.
Cette affaire d’homicide à Kinshasa dépasse désormais le cadre strictement pénal pour mettre en lumière les fractures au sein de la majorité présidentielle. L’instruction qui s’annonce à la Cour de cassation devra établir si ces accusations de commanditaires politiques relèvent de la dénonciation fondée ou des règlements de comptes partisans. L’exigence de justice pour la famille Wampanga se heurte désormais aux arcanes complexes d’un système judiciaire congolais dont la crédibilité est une nouvelle fois mise à l’épreuve.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd