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Vacances parlementaires sous tension : les députés du Nord-Kivu et Sud-Kivu face à l’impossible retour

L’Assemblée nationale a tiré le rideau sur sa session ordinaire ce lundi, un acte rituel qui, en temps normal, marque le début d’une phase cruciale de respiration démocratique. Pourtant, derrière la solennité de la clé de voûte institutionnelle que constitue le Palais du Peuple à Kinshasa, une réalité plus âpre se dessine pour une partie du contingent législatif. La fin de la session de septembre 2025 et le début des vacances parlementaires agissent comme un révélateur cinglant des fractures territoriales qui traversent la République. Pour les députés RDC originaires du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, cette période censée être dédiée au retour vers la base électorale se transforme en un casse-tête existentiel et opérationnel. Comment, en effet, exercer le devoir de proximité lorsque le chemin du retour est barré par la présence d’acteurs armés non étatiques ?

Le mandat d’un parlementaire repose sur un lien organique et constant avec sa circonscription. Les vacances parlementaires sont traditionnellement ce sas où la théorie de la représentation rencontre la pratique du terrain. Or, dans l’Est RDC, et plus spécifiquement dans les provinces en proie à l’activisme du M23 soutenu par Kigali, ce sas est verrouillé. L’insécurité Est RDC n’est pas une variable d’ajustement ; elle est une contrainte absolue qui redéfinit les paramètres mêmes de l’action politique. Les élus se retrouvent ainsi dans une posture inédite : représentants légitimes d’un territoire sur lequel leur capacité d’action et, parfois, leur accès physique, sont sévèrement limités. Cette distorsion pose une question fondamentale sur l’effectivité de la souveraineté populaire dans des zones où l’autorité de l’État peine à s’imposer.

Face à cette impasse, plusieurs stratégies d’adaptation, aussi informelles que contraintes, émergent. Une première cohorte de députés RDC concernés devrait ainsi faire le choix de rester dans la capitale. Kinshasa devient alors, non plus le centre du pouvoir législatif en session, mais le théâtre d’un lobbying intensif et de consultations informelles avec le gouvernement, les ambassades et les agences onusiennes. Leur « vacation » se mue en une mission diplomatique de l’ombre, visant à maintenir la crise de leurs régions à l’agenda national et international. D’autres opteront pour un repli stratégique vers des zones-refuges à l’intérieur du pays, où des communautés de déplacés originaires de leurs fiefs constituent un électorat de substitution. Goma, Bukavu, ou même des villes plus éloignées, pourraient ainsi accueillir des « bureaux de circonscription » délocalisés et temporaires. Ces adaptations, bien que pragmatiques, ne sont-elles pas le signe avant-coureur d’une représentation nationale à plusieurs vitesses, où le poids politique d’un élu serait corrélé à l’accessibilité de son territoire ?

À plus long terme, cette situation interroge la résilience des institutions. La Constitution consacre le principe de la représentation nationale, mais elle présuppose un lien territorial fonctionnel. Lorsque ce lien est rompu par la guerre, c’est tout l’édifice représentatif qui risque de vaciller. L’impossibilité pour les députés RDC du Nord-Kivu et du Sud-Kivu de regagner leurs bases sape la légitimité même du processus de redevabilité. Peut-on véritablement porter la voix d’une population avec laquelle le contact direct est rompu ? Le risque est de voir se cristalliser une forme de « mandat en exil intérieur », où l’élu, bien que siégeant légalement, voit son ancrage et son influence se diluer. La clôture de cette session n’est donc pas qu’une formalité calendaire ; elle est le point de départ d’une période-test pour la démocratie congolaise. Elle met en lumière l’urgence absolue d’une solution politique et militaire à la crise de l’Est, non seulement pour la sécurité des populations, mais aussi pour la santé même de l’État de droit. Sans la restauration de l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire, le Parlement risque de demeurer, pour une partie de ses membres, une chambre d’enregistrement coupée de la réalité qu’elle est censée incarner.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: mediacongo.net

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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