Alors que les présidents Félix Tshisekedi et Paul Kagame s’apprêtent à une rencontre décisive à Washington, la province du Sud-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, est en proie à une nouvelle flambée de violence. Des combats d’une rare intensité ont éclaté, opposant les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) aux rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Cette recrudescence des hostilités soulève une question cruciale : le conflit dans l’Est de la RDC peut-il être apaisé par la seule signature d’un accord de paix à Washington, alors que le terrain continue de brûler ?
Les affrontements se concentrent sur plusieurs axes stratégiques. Les localités de Kamanyola, Kaziba, Katogota et Luvungi, situées sur des routes commerciales et militaires vitales, sont les épicentres de cette nouvelle vague de violence. Les témoignages recueillis auprès des sources locales et militaires font état de tirs d’artillerie lourde, de frappes aériennes et d’engagements directs au sol. Les FARDC, appuyées par des contingents de la coalition régionale et des groupes d’autodéfense locaux, les « wazalendo », tentent de contenir l’avancée des rebelles du M23 vers des villes majeures comme Uvira.
Le bilan humain, encore provisoire, est lourd. Le commandement militaire congolais affirme avoir infligé des pertes significatives aux combattants du M23, parlant de centaines de morts en quelques jours. Cependant, le prix payé par les civils est dramatique. Des sources humanitaires et de la société civile font état de maisons incendiées, de villages désertés et de victimes civiles. La population, prise au piège de ces combats au Sud-Kivu, est une fois de plus contrainte à l’exode. Des milliers de familles fuient les zones de combat, certaines cherchant refuge au-delà de la frontière, au Rwanda, tandis que d’autres errent dans la brousse à la recherche d’un semblant de sécurité.
Cette escalade survient dans un timing plus que troublant, à quelques jours seulement de la rencontre tant attendue entre les présidents congolais et rwandais. L’objectif affiché de ce sommet, organisé sous l’égide des États-Unis, est de finaliser et de signer un accord de paix à Washington censé jeter les bases d’une résolution durable de la crise. Kinshasa accuse depuis longtemps Kigali de soutenir militairement et financièrement le M23, une accusation que le Rwanda dément catégoriquement. La persistance, voire l’intensification, des combats opposant le M23 aux FARDC à la veille de ce rendez-vous diplomatique majeur est perçue par de nombreux observateurs comme un signal d’alarme.
Cette situation illustre la complexité extrême du conflit dans l’Est RDC. Elle met en lumière le fossé qui peut parfois exister entre les négociations politiques de haut niveau et la réalité du terrain, où des groupes armés poursuivent leurs agendas par les armes. La rencontre entre Tshisekedi et Kagame est-elle vouée à l’échec si les hostilités ne cessent pas concrètement ? La crédibilité du futur accord de paix sera directement mesurée à l’aune de sa capacité à faire taire les armes dans des zones comme Luvungi ou Kamanyola.
Pour les habitants du Sud-Kivu, ces jours sont marqués par une angoisse palpable. Chaque explosion, chaque rafale de mitraillette vient rappeler la précarité de leur existence. Les espoirs suscités par l’annonce d’un dialogue direct entre Kinshasa et Kigali sont tempérés par la dure réalité des combats qui font rage à leur porte. La communauté internationale, qui pousse à cette rencontre Tshisekedi Kagame, observe avec inquiétude cette montée de violence, consciente qu’elle pourrait saper les fondements même du processus de paix avant même qu’il ne soit officiellement lancé. L’Est de la RDC retient son souffle, partagé entre l’espoir d’un avenir pacifique et la crainte de voir s’enliser un peu plus un conflit qui dure depuis des décennies.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: https://www.rfi.fr/fr/afrique/20251203-rdc-les-combats-se-poursuivent-au-sud-kivu-avant-la-rencontre-entre-les-pr%C3%A9sidents-congolais-et-rwandais
