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RDC : Tshisekedi diffère le dialogue national, priorité à l’accord de Washington face au M23

Alors que la signature de l’accord de Washington par Félix Tshisekedi et Paul Kagame, sous l’égide de Donald Trump, semble imminente, une autre scène se joue en coulisses, tout aussi déterminante pour l’avenir de la République démocratique du Congo. La pression monte, tant sur le plan interne qu’international, pour que Kinshasa consente enfin à l’ouverture d’un dialogue national inclusif. Pourtant, le gouvernement campe sur une ligne dure, renvoyant cette demande à plus tard, au nom de l’urgence sécuritaire. Cette divergence stratégique n’est-elle pas le signe d’une profonde méfiance, voire d’un calcul politique risqué ?

Le porte-parole du gouvernement, Patrick Muyaya, a martelé la position officielle depuis Washington : la crise qui ensanglante l’Est du pays est d’abord et avant tout une « agression rwandaise » via la rébellion M23. Selon cette logique, les tables de négociation pertinentes sont à Doha et Washington, pas à Kinshasa. « Nous voulons traiter d’abord la question liée à la sécurité », a-t-il déclaré, invoquant la légitimité du président Tshisekedi, « plébiscité à plus de 70% ». Un argument massue, mais qui fait l’impasse sur une réalité : une légitimité électorale, aussi large soit-elle, peut-elle se suffire à elle-même face à une crise multidimensionnelle qui érode la cohésion nationale ?

Face à cette rigidité, l’opposition et la société civile maintiennent leur requête. Martin Fayulu et Moïse Katumbi ont réitéré l’urgence d’un tel dialogue, pointant du doigt l’incapacité des seules initiatives diplomatiques internationales à ramener une paix durable dans l’Est Congo. Leur voix rejoint celle, plus solennelle, des confessions religieuses. Le cardinal Fridolin Ambongo a lancé un avertissement sans équivoque : « Toute démarche qui ne prendrait pas en compte les causes profondes des crises serait vouée à l’échec. » Un message clair à l’adresse du pouvoir, accusé de vouloir contourner le Pacte social pour la paix porté par l’Église.

Ce pacte, matérialisé par une feuille de route publiée fin août et soutenue par la CENCO, l’ECC et d’autres instances religieuses, reste lettre morte. Sa force était pourtant de proposer un cadre congolais pour accompagner, voire encadrer, les processus de Doha et de l’accord de Washington. En refusant de le convoquer, le président Tshisekedi donne l’impression de préférer une résolution externalisée de la crise, entre grandes puissances, au risque de se couper d’une partie substantielle de son propre peuple et de ses leaders moraux. Quelle crédibilité accorder à des accords internationaux si le pays lui-même est divisé sur la manière de les mettre en œuvre ?

La stratégie de Félix Tshisekedi repose sur un pari : celui que la résolution de la crise sécuritaire par la voie militaire et diplomatique internationale étouffera mécaniquement les revendications politiques internes. C’est un jeu à haut risque. D’une part, les processus de Doha et de Washington, bien qu’essentiels, peinent à montrer des résultats tangibles sur le terrain où les combats persistent. D’autre part, en différant indéfiniment le dialogue national, le pouvoir alimente le sentiment d’exclusion d’une frange de la classe politique, creusant les divisions au moment même où l’unité nationale serait un atout face à Kigali.

Le chef de l’État, tout en réaffirmant son attachement de principe à un dialogue, insiste sur le fait qu’il ne saurait être « organisé en dehors de son initiative » ou sous « influences extérieures ». Une affirmation de souveraineté compréhensible, mais qui sonne comme un prétexte pour garder la mainmise sur le calendrier et l’agenda. En réalité, la feuille de route des confessions religieuses, née d’une initiative proprement congolaise, constitue justement une opportunité de reprendre la main sur le narratif de la paix, sans ingérence.

Le temps joue désormais contre tous. Chaque jour de retard dans la recherche d’une solution consensuelle interne affaiblit la position de Kinshasa sur la scène internationale et donne du grain à moudre à ceux qui doutent de sa volonté de régler l’ensemble des racines du conflit. L’accord de Washington peut-il être véritablement pérenne s’il n’est pas adossé à un large consensus national ? La réponse à cette question détermine l’avenir immédiat de la RDC. La balle est désormais dans le camp présidentiel : continuer à opposer sécurité et dialogue, ou saisir l’opportunité historique de les traiter conjointement, pour une fois, sous l’égide des siens.

Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd

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Chloé Kasong
Chloé Kasong
Issue de Kinshasa, Chloé Kasong est une analyste rigoureuse des enjeux politiques et sociaux de la RDC. Spécialisée dans la couverture des élections, elle décortique pour vous l’actualité politique avec impartialité, tout en explorant les mouvements sociaux qui façonnent la société congolaise. Sa précision et son engagement font d'elle une voix incontournable sur les grandes questions sociétales.
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