Les cris de colère résonnent dans l’enceinte du Stade des Martyrs de Kinshasa. « Nous en avons assez de ces promesses non tenues ! », lance Jean*, un agent de maintenance les mains tremblantes de rage. Comme des dizaines de ses collègues, il réclame le paiement de treize longues années d’arriérés de primes, un montant symbolique de 60 000 francs congolais qui représente pourtant l’équivalent d’un mois de salaire pour beaucoup d’entre eux.
La tension a atteint son paroxysme ce mardi 25 novembre lorsque les agents, excédés par l’indifférence des autorités, ont décidé de passer à l’action. Des pneus en flammes ont obscurci le ciel de la capitale congolaise, tandis que les archives administratives volaient en éclats. « Quand on vous ignore pendant treize ans, que reste-t-il comme moyen de se faire entendre ? », interroge amèrement Marie, femme de ménage au stade depuis vingt ans.
La situation actuelle au Stade des Martyrs de Kinshasa dépasse la simple revendication salariale. Elle révèle une crise sociale profonde qui mine le sport congolais depuis des années. Comment expliquer que les gardiens de ce temple du football national soient ainsi abandonnés à leur sort ? Les agents du stade, souvent invisibles, constituent pourtant l’épine dorsale de cette infrastructure mythique.
Les conséquences de cette manifestation pourraient bien dépasser le cadre du conflit social. La LINAFOOT, ligue nationale de football, voit son programme menacé. Deux rencontres capitales risquent l’annulation : la confrontation entre l’OC Renaissance et l’AS Maniema Union, suivie du choc entre l’AS Vita Club et les Anges Verts. Des milliers de supporters pourraient être privés de spectacle, tandis que les clubs subiraient des préjudices financiers considérables.
« Nous ne bougerons pas tant que nos droits ne seront pas respectés », affirme un représentant des agents grévistes. Cette détermination sans faille illustre le désespoir d’hommes et de femmes qui estiment avoir épuisé toutes les voies de dialogue. La crise des arriérés de primes au Stade des Martyrs n’est-elle pas le symptôme d’un malaise plus large touchant les travailleurs congolais ?
Les enjeux dépassent désormais le simple cadre sportif. Cette manifestation historique au Stade des Martyrs interroge sur la place accordée aux travailleurs dans les institutions nationales. Alors que le football congolais cherche à retrouver sa grandeur d’antan, peut-il se permettre d’ignorer ceux qui en sont les premiers artisans ?
La balle est désormais dans le camp des autorités. Trouveront-elles une solution rapide pour apaiser les tensions et permettre la tenue des matchs de la LINAFOOT, ou assistera-t-on à une escalade du conflit qui pourrait paralyser le football national ? L’avenir du sport roi en République Démocratique du Congo se joue peut-être en ce moment même dans les coulisses du Stade des Martyrs.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
