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FRIVAO : 103 millions USD détournés des victimes de Kisangani, réforme urgente

Les victimes de la guerre de six jours de Kisangani se retrouvent une nouvelle fois confrontées à un système défaillant, alors que le Fonds de réparation et d’indemnisation des victimes des activités illicites de l’Ouganda en République démocratique du Congo (FRIVAO) fait l’objet de graves suspicions de détournement. La révélation de ces malversations intervient alors que seules 1,98% des sommes destinées aux réparations ont effectivement été versées aux bénéficiaires légitimes, selon les investigations menées par le Centre de recherche en finances publiques et développement local.

Le constat dressé par le Ministre d’État, Ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Guillaume Ngefa, lors de la 67ᵉ réunion du Conseil des ministres, apparaît sans appel. La mission effectuée à Kisangani du 6 au 10 novembre 2025 a mis en lumière une situation critique où la politisation de la structure, les rétro-commissions et l’introduction de fausses victimes ont compromis l’ensemble du processus d’indemnisation. Comment expliquer qu’un mécanisme conçu pour apporter justice aux populations éprouvées par les conflits ait pu dévier aussi radicalement de sa mission originelle ?

Les chiffres révélés par l’enquête du CREFDL témoignent de l’ampleur du préjudice subi par les victimes de la guerre de Kisangani. Sur les 105.135.000 USD spécifiquement destinés à leur indemnisation, seulement 2.088.136 USD ont été effectivement distribués, laissant un manque à gagner de 103.046.864 USD. Cette situation soulève des interrogations fondamentales sur la gouvernance des fonds publics et la capacité des institutions congolaises à garantir une gestion transparente des ressources.

Face à ce constat accablant, le gouvernement annonce une série de mesures correctives ambitieuses. L’audit financier et organisationnel approfondi, confié à un cabinet international indépendant, constituera la première étape d’un processus de restructuration complet. Cette investigation devra déterminer avec précision l’étendue des détournements, identifier les responsables et vérifier l’intégrité de la base de données des bénéficiaires.

La mise en place d’une équipe de gestion intérimaire représente un autre pilier de cette réforme. Composée de représentants de la société civile, des ministères concernés, des associations de victimes et d’experts en gestion de projets, cette structure devra superviser la transition vers un mode de fonctionnement plus transparent. La crédibilité de cette nouvelle gouvernance dépendra largement de son indépendance réelle face aux pressions politiques et aux intérêts particuliers.

La restructuration du dispositif financier et de paiement constitue le troisième volet de cette réforme. L’institution d’un système direct et traçable pour les victimes, via des virements bancaires ou des services mobiles money, vise à éliminer les intermédiaires et réduire les risques de rétro-commissions. La publication trimestrielle en ligne des budgets, dépenses et listes anonymisées des bénéficiaires devrait permettre un contrôle citoyen tout en respectant la vie privée des victimes.

Le Ministre Ngefa a rappelé avec force que le redressement du FRIVAO dépasse la simple dimension technique pour revêtir un caractère moral impératif. La crédibilité des institutions congolaises et la cohésion nationale dépendent directement de la capacité de l’État à corriger les erreurs, sanctionner les fautes et enfin rendre justice aux véritables victimes. Cette position officielle marque une rupture significative avec les pratiques antérieures et témoigne d’une volonté politique affichée de résoudre ce dossier sensible.

Le contexte juridique international ajoute une dimension supplémentaire à cette affaire. Rappelons que le FRIVAO avait été créé par ordonnance présidentielle pour mettre en œuvre les décisions de la Cour internationale de justice, qui avait condamné l’Ouganda à verser à la RDC cinq tranches annuelles de 65 millions USD à compter du 1er septembre 2022. La répartition prévoyait 69,2% pour les dommages personnels, 12,3% pour les biens et 18,4% pour les ressources naturelles.

La réforme envisagée du FRIVAO s’inscrit dans un processus plus large de réforme de la justice dans la province de la Tshopo. Les dysfonctionnements révélés interrogent en effet la capacité du système judiciaire congolais à traiter les dossiers complexes impliquant des enjeux financiers importants et des victimes multiples. La réussite de cette restructuration pourrait servir de modèle pour d’autres mécanismes similaires dans le pays.

Les associations de victimes, longtemps divisées par des conflits internes, suivent avec attention l’évolution de ce dossier. Leur participation à la nouvelle gouvernance du fonds constituera un test crucial pour la légitimité du processus de réforme. La transparence promise dans la publication des listes de bénéficiaires devrait permettre de restaurer la confiance entre les différentes parties prenantes.

La mise en œuvre résolue de ces mesures démontrera-t-elle la volonté inébranlable de l’État de corriger les erreurs du passé ? Les prochains mois apporteront des éléments de réponse déterminants pour l’avenir du FRIVAO et, plus fondamentalement, pour la crédibilité du système de justice transitionnelle en République démocratique du Congo. La réussite de cette réforme conditionnera non seulement l’indemnisation des victimes de la guerre de Kisangani, mais aussi la capacité des institutions congolaises à garantir une réparation effective pour toutes les victimes de conflits.

Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd

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