La Fédération congolaise des droits de l’homme et de développement (FCDHD) jette un pavé dans la mare en s’opposant fermement à la réouverture des péages de Sanda et Kifulu sur l’axe stratégique Matadi-Boma. Cette décision gouvernementale, présentée comme nécessaire au financement des infrastructures routières, est-elle véritablement justifiée ou constitue-t-elle une nouvelle saignée pour des populations déjà exsangues ?
Le timing de cette annonce interpelle : alors que la province du Kongo Central connaît une fragilité sociale latente, la résurrection de ces points de perception fiscale risque de mettre le feu aux poudres. La FCDHD, dans son communiqué du 19 novembre, ne mâche pas ses mots en qualifiant cette initiative d’« étouffante » pour les contribuables locaux. L’organisation souligne avec justesse que « la part du lion » des recettes fiscales existantes profite davantage aux gouvernants qu’aux populations, créant un dangereux sentiment d’injustice.
L’analyse historique vient étayer ces craintes légitimes. La précédente tentative d’instauration de ces péages avait en effet débouché sur des manifestations violentes et, tragiquement, sur des pertes en vies humaines. Les autorités provinciales jouent-elles avec le feu en ignorant les leçons du passé ? La mémoire collective garde encore les stigmates de ces événements, et la FCDHD met en garde contre le caractère « suicidaire » d’une mesure qui pourrait raviver les tensions sociales.
La question fondamentale qui se pose est celle de l’opportunité de cette taxation supplémentaire. Le Fonds national d’entretien routier (FONER), les péages déjà opérationnels et les multiples services publics générateurs de revenus ne suffisent-ils vraiment pas à assurer l’entretien des routes ? La FCDHD affirme que ces ressources alternatives, si elles étaient correctement gérées et allouées, permettraient de financer les travaux nécessaires sans alourdir le fardeau des petits contribuables.
L’appel lancé à l’Assemblée provinciale du Kongo Central et à l’Agence congolaise des grands travaux (ACGT) révèle une stratégie politique risquée. Les autorités provinciales semblent sous-estimer le potentiel explosif de cette décision, alors que la FCDHD alerte sur la possibilité de voir émerger de nouvelles « révolutions citoyennes ». Le gouvernement provincial mesure-t-il vraiment l’ampleur du mécontentement populaire qui pourrait se cristalliser autour de cette question ?
Au-delà des simples considérations fiscales, c’est la crédibilité même des institutions qui est en jeu. La multiplication des taxes, perçues comme injustes et disproportionnées, érode la confiance des citoyens envers leurs représentants. La situation actuelle dans le Kongo Central pourrait-elle devenir le catalyseur d’un mouvement de protestation plus large ? La FCDHD, en pointant du doigt cette problématique, soulève des questions fondamentales sur la gouvernance et la redistribution des richesses dans la province.
La balle est désormais dans le camp des autorités provinciales. Vont-elles persister dans une voie périlleuse ou sauront-elles écouter les signaux d’alarme ? Les prochains jours seront déterminants pour l’apaisement ou l’exacerbation des tensions sociales dans le Kongo Central. Une chose est certaine : la réouverture des péages de Sanda et Kifulu pourrait bien devenir le test décisif de la capacité du gouvernement provincial à dialoguer avec la société civile et à prendre en compte les préoccupations légitimes des populations.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
