La confiscation du passeport de Seth Kikuni, porte-parole du mouvement « Sauvons la RDC », par la Direction Générale des Migrations (DGM) soulève des interrogations fondamentales sur l’état des libertés individuelles en République Démocratique du Congo. Trente-deux jours après son interpellation à l’aéroport de N’djili, l’opposant politique brise enfin le silence, dénonçant une mesure qu’il qualifie d’« arbitraire » et de « violation flagrante » de ses droits constitutionnels.
Dans une publication sur le réseau social X, l’ancien collaborateur de Joseph Kabila a détaillé les circonstances de cette confiscation de passeport intervenant juste après sa participation au conclave de Nairobi. Le timing de cette mesure administrative interpelle : s’agit-il d’une simple coïncidence ou d’une stratégie délibérée pour museler l’opposition ? La question mérite d’être posée, tant la séquence des événements apparaît troublante.
« Cette rétention, effectuée sans base légale apparente, sans décision de justice et sans notification officielle, constitue une atteinte à la liberté de circulation », affirme M. Kikuni dans son communiqué. L’argumentation juridique développée par l’opposant s’appuie sur un arsenal textuel impressionnant : Constitution congolaise, Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, et Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples. Une telle accumulation de références normatives donne à réfléchir sur la légitimité de l’action des services migratoires.
Le récit des tentatives infructueuses pour récupérer son document de voyage peint le tableau d’une administration opaque, où « chantage » et « intimidation » seraient monnaie courante. Ces accusations graves, si elles s’avéraient fondées, révéleraient des pratiques pour le moins éloignées des standards d’un État de droit. La DGM se trouve ainsi placée sous le feu des projecteurs, contrainte de justifier ses procédures devant l’opinion publique.
La situation actuelle interroge sur l’équilibre des pouvoirs dans notre jeune démocratie. Jusqu’où l’exécutif peut-il aller dans la restriction des droits fondamentaux des acteurs politiques ? La confiscation de passeport comme moyen de pression sur l’opposition représente-t-elle une dérive autoritaire ou une mesure de sécurité justifiée ? Le débat dépasse largement le cas individuel de Seth Kikuni pour toucher à l’essence même de notre contrat social.
L’épisode n’est pas sans rappeler les craintes exprimées par l’intéressé lui-même avant son retour au pays, lorsqu’il évoquait la nécessité de « traverser la vallée de l’ombre de la mort ». Cette métaphore biblique, prémonitoire, souligne la perception d’un climat politique délétère où la simple expression d’opinions divergentes pourrait exposer à des représailles administratives.
La balle est désormais dans le camp des autorités congolaises. Soit elles produisent des éléments tangibles justifiant cette mesure exceptionnelle de confiscation de passeport, soit elles restituent le document et reconnaissent une erreur de procédure. Le silence actuel de l’administration contraste étrangement avec la virulence des accusations portées par l’opposant, alimentant les spéculations sur d’éventuels motifs politiques cachés.
À l’heure où la communauté internationale observe avec attention l’évolution démocratique de la RDC, ce type d’incident risque d’entacher l’image du pays et de nourrir les critiques sur les pratiques gouvernementales. La gestion transparente de ce dossier constituera un test significatif de la maturité politique de nos institutions et de leur attachement réel aux principes démocratiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd
