Dans les établissements scolaires de Kinshasa, une réalité méconnue persiste et affecte directement l’éducation des jeunes filles. Comment peuvent-elles étudier sereinement lorsque leurs besoins fondamentaux d’hygiène ne sont pas respectés ? La question des installations sanitaires dans les écoles de la capitale congolaise révèle des conditions préoccupantes qui poussent de nombreuses adolescentes à manquer les cours pendant leurs règles.
Les témoignages recueillis auprès d’élèves de la commune de Ngaliema dressent un tableau alarmant. Prisca Madingi, 15 ans, exprime son dilemme quotidien : « Pendant mes règles, je vais à l’école mais je n’entre pas dans les toilettes. Il n’y a pas d’endroit propre pour me changer ». Cette situation, loin d’être isolée, montre comment l’absence d’infrastructures adaptées compromet la scolarité des jeunes filles.
Eugénie Kambembo, une autre élève du même établissement, confirme cette réalité : « Quand j’ai mes règles, je préfère rester à la maison. À l’école, il n’y a pas de savon, parfois pas d’eau, et les toilettes sont sales. J’ai peur d’être moquée si ma tenue est tachée ». Ces paroles traduisent l’angoisse que vivent de nombreuses adolescentes confrontées au manque d’intimité et d’hygiène dans leurs écoles.
Les conséquences de cette situation sur l’éducation des filles sont significatives. Selon les enseignants, les absences répétées pendant les périodes menstruelles deviennent un phénomène récurrent. « Nous remarquons que plusieurs filles s’absentent régulièrement, souvent sans en parler ouvertement », observe une enseignante. Ce silence témoigne de la gêne et de la stigmatisation entourant encore les questions d’hygiène menstruelle dans nos établissements scolaires.
Serge Misambu, expert en santé publique, souligne l’importance cruciale de disposer d’installations sanitaires adaptées : « Une élève a besoin de toilettes propres, sûres et fonctionnelles pour étudier dans de bonnes conditions. Le manque d’hygiène favorise certaines infections et peut affecter la fréquentation scolaire ». Son analyse met en lumière le lien direct entre la qualité des infrastructures et la réussite éducative.
La période de la puberté exige une attention particulière en matière d’hygiène intime. L’expert précise : « Dès la puberté, chaque jeune fille prend conscience de l’importance de son hygiène. En l’absence d’infrastructures adéquates, elle peut être exposée à des infections génitales, à des inflammations ou à d’autres complications liées à la santé reproductive ». Ces risques sanitaires constituent une préoccupation majeure pour la santé des adolescentes congolaises.
Comment alors espérer une éducation équitable lorsque des besoins aussi fondamentaux ne sont pas satisfaits ? La question de l’hygiène menstruelle dans les écoles de Kinshasa dépasse le simple confort pour toucher à l’égalité des chances. Les conditions sanitaires précaires créent un obstacle invisible mais bien réel à la scolarisation des filles, renforçant les inégalités entre garçons et filles dans notre système éducatif.
La solution passe par une prise de conscience collective et des actions concrètes. L’expert en santé publique rappelle l’importance des gestes simples : « Pour préserver la santé des élèves, il est essentiel de maintenir une bonne hygiène corporelle, notamment le lavage des mains. Ce simple réflexe permet de réduire la transmission de nombreuses infections. La propreté est la moitié de la santé ». Des mesures basiques mais qui nécessitent des infrastructures adéquates.
L’amélioration des conditions d’hygiène dans les écoles de la RDC représente donc un enjeu multidimensionnel. Elle concerne à la fois la santé reproductive des adolescentes, leur assiduité scolaire et leur bien-être psychologique. Investir dans des installations sanitaires dignes, c’est investir dans l’avenir de milliers de jeunes filles et, par extension, dans le développement de notre pays.
La situation actuelle appelle à une mobilisation de tous les acteurs concernés : autorités scolaires, parents d’élèves, organisations de la société civile et pouvoirs publics. Des solutions existent, depuis l’entretien régulier des installations existantes jusqu’à la construction de nouvelles infrastructures adaptées aux besoins spécifiques des adolescentes.
L’éducation est un droit fondamental qui ne devrait pas être compromis par des questions d’hygiène de base. En améliorant les conditions sanitaires dans nos écoles, nous offrons aux jeunes filles congolaises la possibilité de poursuivre leur scolarité dans la dignité et l’égalité des chances. Le chemin vers une éducation véritablement inclusive passe nécessairement par la résolution de ces problèmes concrets qui affectent le quotidien des élèves.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd
