Une crise humanitaire d’une ampleur inquiétante frappe actuellement les provinces du Nord et du Sud-Kivu, où l’accès aux soins de santé devient un parcours du combattant pour des milliers de personnes. Comment une région peut-elle fonctionner lorsque 85% de ses structures sanitaires sont en rupture de stock de médicaments essentiels ? Cette réalité alarmante, documentée par le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), révèle l’effondrement progressif du système de santé dans cette zone en proie aux violences.
L’évaluation menée par le CICR entre le 2 et le 10 septembre 2025 auprès de 240 structures sanitaires des deux Kivu dresse un tableau sombre de la situation. La quasi-totalité de ces centres manquent cruellement des intrants médicaux les plus basiques pour soigner les patients. Cette rupture de médicaments en RDC atteint des proportions catastrophiques, laissant le personnel médical démuni face aux besoins croissants de la population.
Mais qu’est-ce qui explique cette crise sanitaire au Kivu d’une telle magnitude ? Plusieurs facteurs se conjuguent pour créer cette tempête parfaite. D’abord, l’activisme des groupes armés dans la région perturbe gravement la chaîne d’approvisionnement. Ensuite, l’arrêt des activités de plusieurs organisations humanitaires, faute de financement, a privé la région d’un soutien vital. Enfin, les défis logistiques deviennent insurmontables dans un contexte d’insécurité généralisée.
François Moreillon, chef de la délégation du CICR Nord-Kivu, ne cache pas son inquiétude : « La situation sur le terrain se détériore avec la reprise des violences armées dans le Grand Nord, le petit Nord ainsi que le Sud-Kivu où nous constatons, aux côtés des mouvements de populations, un afflux massif de blessés. Cette situation met sous pression les structures déjà fragilisées. »
Le transfert des blessés conflits Est-Congo vers les structures de santé appropriées relève désormais de l’exploit. Imaginez des patients parcourant de longues distances à pied, risquant leur vie à chaque pas, dans l’espoir de trouver des soins adaptés. Plus de 70% des structures de santé évaluées ont reçu des blessés par armes, témoignant de l’intensité des combats dans la région.
La fermeture des aéroports qui assuraient auparavant l’acheminement des médicaments complique davantage la situation. « Les services que ce soit d’un côté ou de l’autre ne sont plus mobilisables faute de moyens ou en raison de l’instabilité », explique François Moreillon. Le CICR tente de pallier ces difficultés en permettant le transit de certains médicaments à travers les lignes de front, mais ces efforts restent insuffisants face à l’ampleur des besoins.
Cette crise sanitaire ne fait aucune distinction entre les zones contrôlées par l’AFC/M23 et celles sous contrôle gouvernemental. Partout, la population paie le prix fort de cette instabilité. Les structures de santé, déjà vulnérables, croulent sous la pression d’un afflux massif de patients tandis que leurs stocks s’épuisent.
Que faire face à cette urgence humanitaire ? La communauté internationale doit se mobiliser rapidement pour éviter une catastrophe encore plus grande. Le rétablissement des corridors humanitaires, le déblocage de fonds d’urgence et la sécurisation des zones de santé doivent devenir des priorités absolues. Sans une action concertée et immédiate, c’est toute une génération qui risque de payer le prix de cette négligence.
La situation dans les Kivu nous rappelle cruellement que la santé n’est pas un luxe, mais un droit fondamental. Quand les pharmacies se vident et que les hôpitaux ne peuvent plus soigner, c’est la dignité humaine elle-même qui est blessée. La réponse à cette crise déterminera non seulement le sort de milliers de patients, mais aussi la capacité de la région à se reconstruire après des années de conflits.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net