La scène politique congolaise vient de perdre l’une de ses figures les plus discrètes mais néanmoins influentes. Le décès du député national Patrice Kitebi Kibol Mvul, survenu ce mercredi 8 octobre à Kinshasa, laisse un vide dans l’arène politique et soulève des questions sur l’avenir des équilibres parlementaires. L’annonce faite par Jacques Djoli, rapporteur de l’Assemblée nationale, a créé une onde de choc dans les couloirs du Palais du Peuple, où l’élu de Kenge était respecté pour son expertise technique et sa discrétion stratégique.
Qui était véritablement cet homme qui naviguait avec aisance entre technocratie et politique ? Patrice Kitebi incarnait cette génération de cadres congolais formés aux arcanes de la gouvernance financière, ayant servi comme conseiller dans plusieurs cabinets ministériels avant d’accéder au poste de ministre délégué auprès du Premier ministre chargé des Finances. Son passage au gouvernement Matata Ponyo avait marqué les observateurs par sa maîtrise des dossiers complexes et sa capacité à naviguer dans les eaux troubles des finances publiques.
La carrière de ce technocrate chevronné ne s’arrêtait pas aux portes du gouvernement. Sa nomination au poste de Directeur général du Fonds de Promotion de l’Industrie (FPI) démontrait la confiance que les institutions étatiques plaçaient en ses compétences managériales. Mais c’est peut-être dans son rôle de président intérimaire de l’Action pour le Renouveau et le Développement du Congo (ARDC) que Patrice Kitebi révélait ses ambitions politiques les plus subtiles.
Le dernier acte politique significatif du défunt député remonte à mars dernier, lorsqu’il saluait l’intégration de son parti dans le présidium de l’Union sacrée pour la nation. À cette occasion, il avait exprimé la gratitude de l’ARDC envers le Chef de l’État Félix Tshisekedi, tout en confirmant la mobilisation de son parti derrière le président pour le rétablissement de l’intégrité territoriale. Un positionnement stratégique qui interroge : s’agissait-il d’un simple ralliement de circonstance ou d’une adhésion profonde au projet présidentiel ?
La disparition de Patrice Kitebi soulève des interrogations sur l’avenir de la circonscription de Kenge, dans la province du Kwango, qu’il représentait à l’Assemblée nationale. Son expertise en matière financière et sa connaissance des institutions étatiques faisaient de lui un relais précieux pour sa région d’origine. Comment son successeur pourra-t-il maintenir cette influence et cette capacité à faire avancer les dossiers au niveau national ?
L’hommage rendu par la chambre basse du Parlement témoigne de la considération que ses pairs portaient à cet homme discret mais efficace. Dans le paysage politique congolais souvent marqué par les postures et les déclarations fracassantes, Patrice Kitebi représentait une autre approche : celle du travail silencieux, de l’expertise technique et de l’influence discrète. Sa disparition intervient à un moment crucial pour la majorité présidentielle, alors que l’Union sacrée doit consolider ses positions face aux défis multiples qui se présentent.
Quelles conséquences cette disparition aura-t-elle sur les équilibres au sein de l’ARDC et, plus largement, sur la coalition présidentielle ? Le parti perd non seulement son président intérimaire mais aussi un cadre expérimenté capable de naviguer entre les différentes sensibilités politiques. Dans le jeu d’échecs qu’est la politique congolaise, la disparition d’une pièce aussi bien placée ne peut qu’entraîner des recompositions et des repositionnements.
Le décès de Patrice Kitebi nous rappelle que derrière les luttes politiques et les stratégies partisanes, il y a des hommes et des femmes qui consacrent leur vie au service de la nation. Si son héritage politique reste à écrire, son parcours technique et institutionnel demeure un exemple pour les jeunes cadres congolais aspirant à servir leur pays avec compétence et discrétion.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net