Dans une manœuvre diplomatique aussi audacieuse que périlleuse, le président Félix Tshisekedi joue la carte du cobalt congolais comme monnaie d’échange stratégique avec les États-Unis. Cette proposition, qui lie explicitement l’accès aux précieuses ressources minières à un soutien sécuritaire dans l’Est du pays, représente-t-elle une rupture dans la politique étrangère congolaise ou un calcul désespéré face à l’enlisement du conflit oriental ?
Le chef de l’État congolais place Washington devant un dilemme cornélien : garantir son approvisionnement en cobalt – métal critique pour la transition énergétique américaine – contre un engagement militaire accru dans les provinces troublées du Kivu. Cette équation géopolitique soulève des questions fondamentales sur la souveraineté nationale et les nouvelles formes de dépendance stratégique dans un monde multipolaire.
La RDC, qui détient près de 70% des réserves mondiales de cobalt, utilise désormais cette richesse naturelle comme levier dans les relations internationales. « Nous ne pouvons plus accepter que nos ressources profitent à l’économie mondiale tandis que notre population continue de souffrir de l’insécurité », a déclaré Tshisekedi lors de récentes consultations avec des diplomates américains. Cette position marque un tournant dans la diplomatie des matières premières africaines.
La crise sécuritaire dans l’Est congolais, particulièrement l’avancée du M23 soutenu selon Kinshasa par le Rwanda, a contraint le gouvernement à repenser son approche traditionnelle. Face à l’inefficacité relative des missions de paix onusiennes et de l’architecture sécuritaire régionale, Tshisekedi mise sur un partenariat bilatéral fort avec Washington. Cette stratégie du « donnant-donnant » minier sécurise-t-elle vraiment les intérêts nationaux à long terme ?
Les implications de cette proposition dépassent largement le cadre bilatéral. En diversifiant ses partenariats face à l’hégémonie chinoise dans le secteur minier congolais, la RDC tente habilement de rééquiliger les rapports de force internationaux. Cependant, ce jeu d’équilibre entre grandes puissances comporte des risques substantiels : la sujétion aux agendas étrangers et l’érosion progressive de l’autonomie décisionnelle en matière de sécurité nationale.
La mise en œuvre des quotas d’exportation depuis 2025, présentée comme un instrument de régulation et de valorisation des ressources, sert également de mécanisme de pression diplomatique. Cette approche technocratique masque-t-elle une forme de marchandisation de la souveraineté nationale ? Les récentes discussions entre Kinshasa et Washington, initiées avant même l’investiture du président Biden, révèlent la dimension anticipative de cette stratégie.
Au-delà des considérations économiques immédiates, cette initiative interroge la capacité de l’État congolais à assurer sa propre sécurité sans recourir à des concessions stratégiques potentiellement coûteuses. La pacification durable de l’Est passe-t-elle nécessairement par l’aliénation partielle du contrôle sur les ressources minières nationales ?
Cette configuration inédite place les États-Unis dans une position délicate : répondre favorablement à cette offre reviendrait à s’engager militairement dans un conflit complexe, tandis que la refuser pourrait compromettre leurs ambitions en matière de transition énergétique et renforcer la position chinoise en Afrique centrale.
Le président Tshisekedi, en associant ainsi cobalt RDC et soutien sécuritaire américain, prend un risque politique considérable. Son habileté à négocier les termes de cet échange stratégique déterminera non seulement l’issue de la crise dans l’Est, mais aussi la place de la RDC dans la nouvelle géopolitique des matières premières critiques.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: https://www.scrippsnews.com/world/congos-president-on-trump-war-and-americas-cobalt-future?utm_source=chatgpt.com