Dans les cours de récréation de Bukavu, une crise silencieuse met en danger la santé de milliers d’élèves. Comment peut-on, en 2024, en être réduit à devoir choisir entre des toilettes insalubres et la défécation en plein air ? La question se pose avec acuité dans plusieurs établissements scolaires du Sud-Kivu, où l’état des sanitaires relève du scandale sanitaire.
Le constat est accablant : latrines bouchées, matières fécales visibles, urines stagnantes et absence criante d’eau courante. Cette situation d’hygiène précaire touche indifféremment écoles publiques et privées, particulièrement dans les communes de Kadutu, Bagira et certaines zones de Kabare. Les élèves, contraints de se retenir pendant les heures de classe ou de se soulager dans la nature, développent des comportements à risque pour leur santé.
Mais pourquoi en est-on arrivé là ? L’absence de services d’entretien régulier des installations sanitaires scolaires explique en grande partie cette dégradation progressive. Sans mécanisme de maintenance, les toilettes se transforment en foyers infectieux, dégageant des odeurs nauséabondes et devenant de véritables incubateurs à maladies. Diarrhées, infections parasitaires et problèmes dermatologiques guettent les enfants les plus vulnérables.
La Nouvelle Dynamique de la Société Civile (NDSCI) tire la sonnette d’alarme avec des mots forts : « situation inacceptable » qui nécessite une mobilisation urgente de toute la communauté. Wilfried Habamungu, rapporteur adjoint de l’organisation, insiste sur l’impérative nécessité d’interventions rapides. « L’indifférence n’est plus permise face à cette crise sanitaire qui compromet l’avenir de nos enfants », martèle-t-il.
Les chiffres de l’UNICEF viennent corroborer cette inquiétude : 12% de la population congolaise pratique encore la défécation en plein air, avec des conséquences désastreuses sur la santé publique. Les écoles, censées être des lieux d’apprentissage et d’épanouissement, deviennent paradoxalement des vecteurs de maladies évitables.
Cette problématique de l’assainissement scolaire dans le Sud-Kivu dépasse la simple question des infrastructures. Elle interroge notre capacité collective à garantir des conditions d’apprentissage décentes à la jeunesse congolaise. Comment espérer une éducation de qualité lorsque les besoins physiologiques les plus élémentaires ne sont pas respectés ?
La solution passe nécessairement par une prise de conscience collective et une action coordonnée des autorités scolaires, des parents d’élèves et des services publics. Investir dans des toilettes fonctionnelles et entretenues, c’est investir dans la santé et la réussite scolaire de toute une génération. L’enjeu dépasse la simple construction de latrines : il s’agit de restaurer la dignité de milliers d’enfants et de leur offrir un environnement propice à leur développement.
Alors que la rentrée scolaire approche, la question de l’assainissement dans les écoles de Bukavu reste entière. Serons-nous capables de relever ce défi sanitaire et de offrir à nos enfants les conditions minimales de salubrité qu’ils méritent ? La réponse engage l’avenir de toute une région.
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net