La session budgétaire de septembre 2025 s’est ouverte sous les auspices d’une ambition financière colossale : examiner et adopter un projet de loi de finances chiffré à plus de 20 milliards USD pour l’exercice 2026. Conformément à l’article 115 de la constitution congolaise, cette session ordinaire des deux chambres du parlement place la République Démocratique du Congo à un carrefour décisionnel critique, où les priorités nationales devront être traduites en allocations budgétaires concrètes.
Dans un discours marquant, Vital Kamerhe, président de l’Assemblée nationale, a immédiatement orienté les débats vers l’impératif sécuritaire. Rappelant le rôle de l’autorité budgétaire, il a plaidé pour une augmentation substantielle des crédits destinés à la défense nationale, à la sécurité et au maintien de l’ordre public. « Les crédits budgétaires doivent refléter les priorités nationales », a-t-il affirmé, soulignant la nécessité de renforcer les capacités de dissuasion des FARDC et d’améliorer les conditions de vie des personnels en uniforme.
Mais la proposition la plus significative concerne les Wazalendo, ces patriotes résistants dont le statut demeure ambigu. Vital Kamerhe a explicitement appelé à une « dotation spéciale » pour faciliter leur formation et leur alignement sur les standards de l’armée régulière. Cette initiative, présentée comme un complément nécessaire à l’effort de défense, soulève pourtant des questions fondamentales : comment concilier renforcement capacitaire et respect des droits humains ?
Car derrière les bonnes intentions affichées se cache une réalité autrement plus complexe. La Réserve Armée de la Défense (RAD), instituée par la loi n°23/014 du 22 mai 2023, devait théoriquement encadrer ces forces citoyennes. Pourtant, sur le terrain, les Wazalendo sont régulièrement accusés d’abus et de violations des droits humains, comme en attestent plusieurs rapports onusiens. L’épisode récent de Uvira, où ils se sont opposés à l’installation du général Gasita à la 33e région militaire, illustre les risques de dérive d’une structure mal contrôlée.
Le président de l’Assemblée nationale a paradoxalement assorti son plaidoyer sécuritaire d’un engagement pour la qualité de la dépense publique. Évoquant les investissements structurants dans l’agriculture, l’énergie, l’éducation et la santé, il a promis que le budget 2026 répondrait aux défis de l’industrialisation et de l’amélioration des infrastructures. Mais comment concilier cette vision développementale avec l’augmentation massive des dépenses militaires ? La quadrature du cercle budgétaire congolais réside dans cet arbitrage délicat entre sécurité immédiate et développement à long terme.
La session budgétaire 2025 s’annonce donc comme un exercice d’équilibre périlleux. D’un côté, la pression sécuritaire justifie des investissements massifs dans la défense. De l’autre, les besoins de développement exigent des ressources substantielles pour les secteurs sociaux. Entre ces deux impératifs, le parlement congolais devra trancher, sachant que ses décisions engageront le pays pour les années à venir. Le véritable test ne résidera pas seulement dans l’adoption du budget, mais dans sa capacité à imposer un contrôle effectif sur l’utilisation des fonds publics, particulièrement dans le domaine sensible de la défense.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd