La mairie de Lubumbashi a vécu, mardi 19 août, une séquence pour le moins tumultueuse, illustrant une fois de plus les fractures qui minent l’institution municipale. Le déclencheur ? L’arrivée de Joyce Tunda, maire adjointe, dans ses bureaux. Son simple passage a suffi à mettre le feu aux poudres, provoquant un face-à-face tendu avec les conseillers communaux de la commune de Kampemba, présents sur place pour une audience avec le maire intérimaire.
Selon le récit des élus locaux, l’incident trouve son origine dans un ordre d’évacuation qui leur aurait été intimé, un ordre qu’ils attribuent directement à l’adjointe au maire. Un manquement au respect dû à leur fonction, clament-ils, eux qui se disent les légitimes représentants du peuple. Leur indignation, capturée par une vidéo devenue virale sur les réseaux sociaux, montre des élus exaspérés, brandissant la menace d’une action en justice contre un agent de police qui aurait porté la main sur l’un des leurs. Une situation qui pose une question fondamentale : jusqu’où peut aller la tension dans la gestion des affaires municipales ?
Du côté de l’entourage de Joyce Tunda, on dépeint une version radicalement différente des événements. Il ne s’agirait pas d’un caprice autoritaire, mais d’une simple application du protocole de sécurité. À l’entrée de l’autorité municipale, le passage doit être libéré ; une mesure de routine présentée comme une nécessité administrative. La source précise que les conseillers, réunis dans la salle Wantashi, se sont levés en masse et ont improvisé une sortie vers le couloir, créant ainsi la confusion et l’agitation. Qui dit vrai ? La version protocolaire ou le récit du manque de respect ?
Cet épisode ne surgit pas ex nihilo. Il s’inscrit dans un contexte de tension municipale persistant au Haut-Katanga, où une lutte sourde pour le contrôle du fauteuil majoral oppose depuis plusieurs mois le titulaire, actuellement intérimaire, et son adjointe. Un conflit larvé qui paralyse la gouvernance locale et hypothèque le développement de la capitale cuprifère. Le conflit mairie Lubumbashi dépasse ainsi la simple altercation ponctuelle ; il est le symptôme d’une bataille plus large pour le pouvoir et l’influence.
L’élément le plus troublant dans cette affaire reste sans doute la décision du Conseil d’État. L’institution suprême a bel et bien réhabilité Joyce Tunda dans ses fonctions de maire intérimaire, invalidant de fait la légitimité de son adversaire. Pourtant, cette ordonnance, censée trancher le différend, reste lettre morte. Pourquoi une décision de justice de si haut niveau n’est-elle pas appliquée ? Cette inertie interroge sur la réalité du pouvoir des institutions face aux rapports de force politique locale RDC. Le non-respect de cette injonction judiciaire ouvre-t-il la porte à une impunité structurelle dans la gestion des villes ?
Les conseillers communaux Kampemba, pris en étau dans cette guerre de leadership, apparaissent à la fois comme des pions et des témoins gênants de cette déliquescence. Leur colère, si elle semble dirigée contre un incident précis, est aussi le reflet d’une frustration plus profonde face à un système où les jeux d’ego prennent le pas sur le service public. La situation à Lubumbashi pose in fine la question de la gouvernance des grandes villes congolaises : peuvent-elles se permettre d’être le théâtre de telles guerres intestines alors que les défis du développement urbain sont si criants ? La crédibilité de toute la politique locale RDC est en jeu.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net