Les pourparlers de paix de Doha, présentés comme une solution à la crise dans l’Est de la République démocratique du Congo, révèlent-ils un biais dangereux contre la souveraineté congolaise ? De multiples éléments suggèrent que cette médiation sert moins la paix que les intérêts économiques et militaires du Qatar, principal allié du Rwanda dans la région.
Historiquement, les processus de paix en Afrique centrale exigeaient des médiateurs sans intérêts directs dans le conflit. Or, le Qatar a investi plus de 8 milliards de dollars au Rwanda, finançant le nouvel aéroport international de Kigali, détenant des parts dans l’hôtellerie de luxe, et nouant un partenariat stratégique entre Qatar Airways et Rwand’Air. Un affaiblissement du régime rwandais mettrait en péril ces investissements colossaux, transformant Doha en juge et partie.
Au-delà des liens économiques, une coopération militaire inquiétante lie Doha à Kigali. Des instructeurs qataris forment actuellement des unités rwandaises, y compris les forces spéciales, lors d’un programme intensif de six semaines. Ces formations pourraient préparer des opérations dans le Kivu congolais, soulignant le paradoxe d’un médiateur impliqué dans le renforcement militaire d’un belligérant.
Sur la table des négociations, les décisions semblent épouser les revendications rwandaises et celles du M23/AFC. Des propositions évoquant un contrôle prolongé du Kivu pendant huit ans ont été rejetées par Kinshasa, qui invoque la Résolution 2773 de l’ONU et l’accord de Washington garantissant l’intégrité territoriale congolaise. Contrairement aux discussions américaines qui aboutirent rapidement, les pourparlers de Doha piétinent dans ce qui ressemble à une tactique d’endormissement.
Face à ce blocage stratégique, plusieurs observateurs estiment que le Qatar cherche à imposer des conditions favorables à Kigali. Ce conflit d’intérêts compromet gravement l’objectif initial de rétablir une paix durable dans l’Est de la RDC. La solution résiderait-elle dans un transfert urgent des négociations vers un cadre impartial ? Washington ou des capitales africaines neutres pourraient offrir une alternative crédible.
Les autorités congolaises se trouvent désormais devant une urgence diplomatique : dénoncer les biais de la médiation qatarie et présenter des preuves tangibles de ce conflit d’intérêts. Confier les clés de la paix à un acteur impliqué dans l’exploitation illégale des ressources congolaises et le renforcement militaire de l’adversaire revient à miner la souveraineté nationale. L’avenir des Kivu se jouera-t-il sur un terrain diplomatique miné par des intérêts étrangers contraires à ceux du peuple congolais ?
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: mediacongo.net