La République Démocratique du Congo a lancé un appel pressant à la communauté internationale pour un soutien financier immédiat à la mission d’établissement des faits et à la commission d’enquête indépendante des Nations Unies sur les graves violations des droits humains dans l’Est du pays. Lors de la commémoration de la journée nationale du Génocide congolais à Kinshasa le 2 août, la ministre des Droits Humains, Chantal Chambu Mwavita, a dénoncé avec véhémence le sous-financement criant qui entrave les investigations sur les atrocités commises au Nord-Kivu et au Sud-Kivu.
« Comment construire la paix sans vérité ? Comment garantir la non-répétition sans justice ? », s’est interrogée la ministre, soulignant que l’absence de ressources compromet sérieusement l’enquête ONU RDC mandatée par le Conseil des droits de l’homme le 7 février 2025. Des documents internes consultés par Reuters confirment que le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH), confronté à une pénurie de liquidités de 60 millions de dollars, ne peut plus poursuivre ses travaux.
Le financement de la commission droits humains apparaît pourtant comme une pièce maîtresse dans la lutte contre l’impunité des crimes RDC. Selon une lettre du Haut-Commissaire Volker Turk, les contraintes budgétaires « entravent gravement » les investigations sur les exécutions sommaires et violences sexuelles perpétrées notamment à Goma et Bukavu après la prise de ces villes par les rebelles du M23. Alex El Jundi, chef de l’Unité d’appui aux enquêtes du HCDH, a révélé lors d’une réunion informelle que les conclusions préliminaires font état de « violences sexuelles atroces » susceptibles de constituer des crimes de guerre.
La paralysie de cette structure menace directement la justice pour les victimes Kivu. Les commissions d’enquête (COI) jouent un rôle pivot en fournissant des preuces utilisables par la Cour pénale internationale. Or, comme l’a précisé El Jundi, les réserves sont épuisées après une allocation exceptionnelle de 1,1 million de dollars, laissant le budget global de 3,9 millions non couvert. Cette carence financière intervient moins de six mois après la création de la commission lors de la 37ème session extraordinaire du Conseil.
Le gouvernement congolais qualifie cette situation d’« échec de solidarité » et d’« abandon des engagements internationaux ». Dans un plaidoyer solennel, la ministre Mwavita a imploré les États membres de l’ONU et les bailleurs de fonds : « Ce soutien n’est pas un geste diplomatique, c’est une condition essentielle pour briser le cycle de l’impunité. Le peuple congolais n’a pas besoin de pitié, il a besoin de justice. » Elle rappelle que les violations Est Congo exigent des enquêtes crédibles pour établir la vérité historique.
Les racines de cette crise remontent aux coupes budgétaires américaines sous l’ère Trump et aux retards de paiement de plusieurs pays contributeurs. Volker Turk s’est alarmé de l’impact sur les mécanismes de protection, tandis que les contributions volontaires ont chuté drastiquement. Sans un déblocage rapide des fonds, la documentation des massacres – dont certains pourraient être qualifiés de génocide – risque de s’arrêter net, laissant les survivants sans perspective de réparation.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd