Dans un coup de force administratif sans précédent, la République Démocratique du Congo vient de réaffirmer sa maîtrise sur son patrimoine souterrain. Le ministre des Mines, Kizito Pakabomba, a officiellement réceptionné ce lundi un rapport stratégique du Cadastre Minier (CAMI), déclenchant la reprise immédiate de 594 titres miniers et de carrières. Cette opération d’assainissement sectoriel libère pas moins de 31 648 kilomètres carrés – une superficie dépassant celle de la Belgique – jusque-là sous emprise spéculative ou inactive.
Comment ce colossal rapatriement foncier transforme-t-il l’équation minière congolaise ? Le document, qualifié par le ministre de « nettoyage exhaustif du fichier cadastral », représente l’équivalent de 37 253 carrés miniers désormais réintégrés dans le giron étatique. Cette manœuvre s’inscrit dans la droite ligne des exigences de bonne gouvernance prônées par le gouvernement, mettant fin à des années de gel abusif des droits d’exploitation. « Le temps de la complaisance et de l’appropriation inactive est révolu », a martelé Kizito Pakabomba, soulignant que cette reconquête intervient à point nommé alors que la demande mondiale en minerais stratégiques (cobalt, cuivre, coltan) connaît une croissance exponentielle.
Au-delà de la simple reprise, le rapport du CAMI orchestré par son directeur général Popaul Mabolia Yenga enclenche une dynamique de régularisation massive : 210 droits miniers précédemment paralysés par des situations prolongées de force majeure couvrant 18 709 carrés miniers sont désormais réactivés. Cette double action – récupération et assainissement – débloque ainsi près de 50 000 km² d’actifs miniers potentiels, soit près de 2% du territoire national. Une transfusion vitale pour un secteur minier qui contribue à plus de 30% du PIB congolais mais pâtissait jusqu’ici d’une fragmentation dommageable.
Cette opération de souveraineté minière Congo constitue un pivot géoéconomique majeur. Dans un contexte où les puissances mondiales se disputent l’accès aux « leviers stratégiques du XXIe siècle » – selon les termes du ministre –, le contrôle renforcé sur ces titres offre à Kinshasa une position de négociation inédite. Kizito Pakabomba y voit la matérialisation de la vision du Président Félix Tshisekedi et du Programme d’Action du Gouvernement conduit par Judith Suminwa Tuluka : « Cette démarche réaffirme la souveraineté de l’État congolais sur son sous-sol face à la ruée internationale vers les minerais critiques ».
Quelles retombées économiques tangibles la RDC peut-elle escompter ? La remise en circulation de ces titres miniers pourrait générer des recentrées fiscales supplémentaires estimées à plusieurs centaines de millions de dollars annuels, selon des experts du secteur interrogés par Congo Quotidien. Plus fondamentalement, elle permet de restructurer le marché des permis selon une logique de transparence et de performance, éliminant les détenteurs inactifs qui bloquaient le développement de gisements majeurs.
Le ministre a salué le rôle moteur du CAMI dans cette reprise historique tout en appelant à une mobilisation élargie de toutes les institutions minières nationales. Ce rapport marque-t-il l’amorce d’une nouvelle gouvernance minière ? La pérennisation de cette dynamique exigera une vigilance accrue contre la reconstitution de poches de spéculation. Une certitude s’impose : avec cette opération d’assainissement du secteur minier, la RDC envoie un signal fort aux investisseurs comme aux partenaires internationaux – sa souveraineté sur ses ressources n’est plus négociable.
Article Ecrit par Amissi G
Source: mediacongo.net