Les consultations psychiatriques au Centre neuro-psychiatrique SOSAM de Bukavu ont connu une augmentation alarmante, triplant au premier semestre 2025 comparé à 2024. Les chiffres officiels révèlent un bond de 1 600 consultations au deuxième trimestre 2024 à 4 865 entre janvier et juin 2025. Comment expliquer cette flambée inédite en près de 30 ans d’existence du centre ?
Le Dr Bisimwa Zagabe, psychiatre et manager du centre SOSAM, alerte sur une situation sans précédent : Nous avions 1 607 consultations au premier semestre 2024. Aujourd’hui, nous frôlons les 5 000 consultations. C’est une hausse qui dépasse le simple doublement
. Cette crise de santé mentale à Bukavu serait directement liée au climat d’insécurité persistante dans le Sud-Kivu.
La recrudescence des activités du M23 depuis février constitue le principal facteur déclenchant. Fermetures prolongées des banques, justice populaire, déplacements forcés de populations et scènes de violence ont créé un terreau toxique pour le psychisme humain. Ces événements traumatisants, combinés à la précarité économique et alimentaire, déséquilibrent mentalement les individus
, explique le Dr Zagabe. Imaginez vivre chaque jour avec la peur au ventre, sans accès à vos économies, en témoin de scènes macabres : n’est-ce pas un cocktail destructeur pour l’esprit ?
Les statistiques santé RDC révèlent une vulnérabilité genrée frappante : les femmes représentent 50,7% des patients (2 467 consultations), contre 49,3% pour les hommes (2 398). Elles subissent davantage de violences spécifiques
, précise le médecin. Mais une autre catégorie paie un lourd tribut : les enfants. Perturbations scolaires, exposition à des images horribles et cauchemars récurrents marquent durablement leur développement psychique.
Face à cette urgence, le centre SOSAM – œuvre des Frères de la Charité – mobilise une équipe pluridisciplinaire (psychologues, assistants sociaux, médecins). Cependant, l’impact du conflit M23 sur la psychologie collective dépasse les capacités actuelles. Cette crise santé mentale au Sud-Kivu exige une réponse coordonnée des autorités sanitaires. Comme un organisme sous perfusion, la population de Bukavu a besoin d’un soutien psychologique renforcé et d’un retour à la stabilité économique. La prise en charge précoce des traumatismes reste le meilleur rempart contre des séquelles durables.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd