La terre s’est refermée comme un piège mortel sous les pieds du creuseur anonyme d’Ifarifari. Mardi soir, 24 juin 2025, dans ce carré minier perdu du groupement Banabangi, un glissement de terrain a brutalement enseveli un homme au fond d’un puits artisanal d’or. « On a juste entendu un grondement, puis plus rien… comme si la montagne avalait son or et les hommes avec », confie, la voix nouée, un témoin présent sur le site minier du territoire de Walikale.
Selon les sources du service territorial des mines, la victime travaillait dans l’obscurité humide d’une galerie artisanale lorsque des tonnes de terre et de roche se sont détachées. Malgré les efforts désespérés des autres creuseurs, impossible de la dégager à temps. Le corps n’a été extrait des décombres que ce mercredi matin, sous le regard impuissant d’une communauté minière habituée au danger mais jamais résignée face à la mort.
Dès l’aube, la police des mines et l’auditorat militaire ont investi les lieux pour constater l’ampleur du drame. Un constat amer : un mort, des équipements rudimentaires, et cette question lancinante – pourquoi ce glissement de terrain dans cette mine artisanale de Walikale ? Les autorités ont ordonné l’enterrement immédiat du corps, une décision qui soulève plus d’interrogations qu’elle n’apaise les consciences.
Dans une tournure aussi brutale que l’accident lui-même, trois compagnons de la victime ont été arrêtés par la police des mines « pour les besoins de l’enquête ». Une mesure qui fait grincer des dents dans la communauté des creuseurs. « On risque nos vies chaque jour pour quelques grammes d’or, et voilà comment on nous traite quand la terre se venge ? », s’insurge un ancien du site minier d’Ifarifari.
Pourtant, malgré le choc et les larmes, l’exploitation a repris ce mercredi après-midi. Comme si rien ne s’était passé. Les pioches ont recommencé à frapper la roche dans les puits voisins de celui qui a coûté la vie à un homme. Cette reprise fulgurante interroge : la précarité économique justifie-t-elle de brader la sécurité dans les mines artisanales du Nord-Kivu ?
Derrière ce drame personnel se cache une réalité collective implacable. Combien de morts faudra-t-il encore dans les carrés miniers de la RDC avant que des mesures concrètes soient prises ? L’exploitation artisanale de l’or, vitale pour des milliers de familles, reste un jeu de roulette russe où la fatalité tient lieu de norme de sécurité. Les creuseurs d’Ifarifari, comme ceux de tant d’autres sites à travers le pays, travaillent sans évaluation géotechnique, sans équipement de protection, sous la menace permanente d’un sous-sol instable.
Ce glissement de terrain à Walikale n’est pas qu’un accident minier isolé. C’est le symptôme d’un système où la richesse du sous-sol congolais se paie au prix du sang des plus vulnérables. Tant que l’exploitation artisanale restera synonyme de précarité mortelle, tant que la reprise immédiate des activités primeront sur le deuil et la prévention, le cycle tragique se perpétuera. La terre d’Ifarifari a englouti un homme ; combien d’autres devront disparaître avant que l’État et les exploitants n’assument leurs responsabilités ?
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Actualite.cd