Le secteur entrepreneurial congolais vient de franchir un cap décisif avec l’opérationnalisation concrète de la Startup Act, cadre légal destiné à transformer radicalement l’écosystème des jeunes entreprises innovantes en République Démocratique du Congo. Ce mercredi 18 juin 2025, Kinshasa a vibré au rythme d’un séminaire stratégique co-organisé par la Délégation de l’Union européenne, le gouvernement congolais et la Fédération des Entreprises du Congo (FEC), marquant une étape cruciale dans la structuration du paysage économique national.
L’événement fait suite à l’adoption récente par le Conseil des Ministres de quatre décrets d’application majeurs, complétés par un arrêté interministériel du 27 mai 2025 fixant les droits, taxes et redevances applicables. Ces textes, longtemps attendus par la communauté entrepreneuriale, jettent les bases d’un système national d’appui à l’entrepreneuriat incluant un mécanisme de labellisation des entreprises à capitaux majoritairement congolais et l’institution d’un mois annuel dédié à l’innovation et au dialogue public-privé.
Mario Caivano, chef d’équipe Gouvernance, économie et sécurité à l’UE, a souligné l’importance stratégique de cette avancée : « L’amélioration de l’environnement des affaires constitue une priorité centrale de notre partenariat avec la RDC. L’opérationnalisation de cette Startup Act permettra aux jeunes congolais porteurs de projets innovants de développer durablement leurs activités économiques. » Un engagement qui traduit la volonté européenne de soutenir la transition vers une économie formelle et dynamique.
Luc Aramaratou, représentant du Ministre de l’Industrie et du Développement des PME, a détaillé l’impact transformateur de ces mesures : « Ces textes renforceront la culture entrepreneuriale, structureront l’accompagnement public et favoriseront l’émergence d’un tissu économique solide porté par la jeunesse et les femmes. La Startup Act incarne une nouvelle vision industrielle pour notre pays. » Parmi les innovations phares : un accès facilité aux marchés publics, la création d’emplois formalisés et des incitations à l’innovation technologique.
Mais un cadre légal suffit-il à transformer l’essai ? Ambroise Tshiyoyo, Vice-président de la FEC, a tempéré l’enthousiasme par un rappel réaliste : « Le problème congolais n’est pas l’absence de lois mais leur application effective. Pour un entrepreneuriat performant, il faut que ces textes soient mis en œuvre concrètement. » Un avertissement qui pointe du doigt le défi persistant de la formalisation économique dans un pays où l’informel représente encore près de 80% de l’activité.
La question cruciale du financement et des débouchés commerciaux a été abordée par Freddy Mpinda Mukenge, conseiller de la Première ministre : « Une startup sans marché est vouée à l’échec. Nous plaidons pour que 30% des marchés publics soient réservés aux startups labellisées. » Cette proposition audacieuse, si elle se concrétise, pourrait injecter plus de 50 milliards de francs congolais annuels dans l’écosystème entrepreneurial naissant.
Cette mobilisation institutionnelle répond aux instructions pressantes du Président Félix Tshisekedi, qui avait qualifié l’entrepreneuriat de « levier stratégique pour l’emploi et la transformation structurelle de l’économie congolaise ». Dans un contexte où seulement 15% des jeunes diplômés trouvent un emploi formel, la Startup Act représente un pari sur l’avenir. Ses retombées potentielles ? La création de 500 000 emplois directs d’ici 2030 selon les projections gouvernementales et une augmentation de 7% du PIB liée à la formalisation des micro-entreprises innovantes.
Le séminaire de Kinshasa a précisé les modalités pratiques de labellisation et défini le rôle des structures d’accompagnement agréées. Prochaine étape : la mise en place effective des guichets opérationnels d’ici fin juillet 2025. Reste à savoir si ce cadre juridique ambitieux parviendra à catalyser les énergies créatives de la jeunesse congolaise tout en surmontant les pesanteurs administratives historiques. L’avenir économique de la RDC se joue peut-être dans cette capacité à transformer l’essai législatif en réalité entrepreneuriale.
Article Ecrit par Amissi G
Source: Actualite.cd