Malgré les récentes tensions diplomatiques, les États-Unis poursuivent activement leur médiation entre la République démocratique du Congo et le Rwanda, avec l’objectif affiché de parvenir à un accord de paix historique d’ici juin ou juillet. Cette feuille de route a été réitérée jeudi par Troy Fitrell, directeur au Bureau des affaires africaines du Département d’État américain, lors d’un échange organisé par l’influent think tank Atlantic Council.
« Nous visons toujours un accord de paix en juin ou juillet entre la RDC et le Rwanda », a déclaré M. Fitrell, soulignant l’urgence de stabiliser l’Est congolais après trois décennies de conflits cycliques. Cette déclaration intervient alors que des équipes techniques des deux nations sont actuellement réunies à Washington pour concrétiser la prochaine étape du processus.
Le fondement de ces négociations reste la Déclaration de principes signée fin avril 2025 dans la capitale américaine, document qualifié d’« avancée significative » par les médiateurs. Ce texte engage les parties à produire un avant-projet d’accord de paix avant le 2 mai prochain. Une course contre la montre s’est engagée, alors que persiste le contentieux central : Kinshasa accuse Kigali de soutenir la rébellion du M23 (Mouvement du 23 mars), tandis que le Rwanda dénonce des collusions entre l’armée congolaise et les FDLR, groupe impliqué dans le génocide rwandais de 1994.
Cette médiation américaine survient dans un paysage diplomatique particulièrement fragmenté. Plusieurs initiatives parallèles – angolaises, kényanes ou est-africaines – tentent également de résoudre la crise. Comment ces efforts multiples interagissent-ils ? M. Fitrell a tenu à rassurer : « Les diverses initiatives de paix aux niveaux régional et international se renforcent mutuellement », suggérant une coordination sous-jacente malgré les apparences.
Pourtant, l’annonce récente du retrait rwandais de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) a jeté un froid. Kigali accuse en effet la RDC d’« instrumentaliser » cette organisation régionale avec l’appui de certains membres. Cette décision risque-elle de torpiller les avancées de la médiation américaine ? Les analystes soulignent que ce geste illustre la défiance persistante entre les deux capitales, même autour des tables de négociation.
La complexité du conflit dans l’Est congolais demeure l’écueil majeur. Cette région riche en minerais stratégiques subit depuis 1996 des violences multiformes, avec près de 130 groupes armés recensés. Le M23, réapparu fin 2021, contrôle actuellement d’importants territoires du Nord-Kivu, déplaçant plus de 800 000 civils selon le HCR. Les pourparlers actuels représentent-ils une réelle opportunité de rupture avec ce cycle infernal ?
Les observateurs notent que le calendrier serré imposé par Washington témoigne d’une volonté de capitaliser sur l’élan créé par la Déclaration de principes. Cependant, plusieurs défis critiques subsistent : la vérification des accusations mutuelles de soutien aux rebelles, le désengagement des combattants, et la définition d’un mécanisme de surveillance crédible. Le processus de paix impliquant le M23 nécessitera également des garanties spécifiques pour être viable.
Alors que la date butoir du 2 mai approche, la communauté internationale retient son souffle. Un échec à produire l’avant-projet d’accord pourrait en effet relancer le cycle de violences et compromettre l’échéance de juin-juillet. Dans ce contexte, la médiation américaine joue un rôle d’ultime recours, tentant de transformer une méfiance historique en architecture de paix durable pour la région des Grands Lacs.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: mediacongo.net