Dans la région tourmentée de Djugu, en Ituri, un silence anormal plane sur les cours de récréation. Près de 54 000 élèves du primaire et du secondaire sont contraints à une pause forcée depuis le 19 mai 2025, pris en étau entre les FARDC et le groupe armé Zaïre. Une interruption qui intervient à quelques jours des épreuves de fin d’année, plongeant le système éducatif local dans une crise sans précédent.
« Nous devrions commencer la période des examens, mais les enfants ne viennent plus à l’école. Même demain, il n’y a pas d’espoir »
Floribert Djombu, préfet de l’Institut de Jina, alerte sur les conséquences durables de cette paralysie. Après avoir surmonté une grève des enseignants grâce à des cours de rattrapage intensifs, les établissements scolaires font face à un ennemi plus insidieux : la psychose collective. « Les enfants ont perdu le courage de venir. Ils craignent que la guerre ne reprenne », explique-t-il, soulignant l’urgence d’une stabilisation sécuritaire.
Un système éducatif au bord de l’implosion
Comment reconstruire quand les fondations tremblent ? Les écoles de Jina cumulent les défis :
- Retard académique accumulé
- Infrastructures souvent précaires
- Enseignants sous-payés
- Déplacement massif des familles
La récente flambée de violence vient briser les efforts de résilience déployés depuis des mois. Pourtant, comme le rappelle un parent d’élève sous couvert d’anonymat : « L’éducation est notre seule arme contre ce cycle de violence ».
Quelles solutions face à l’urgence ?
Les acteurs locaux plaident pour une approche multidimensionnelle :
- Déploiement de forces de protection autour des écoles
- Campagnes de sensibilisation communautaire
- Mise en place de cellules psychologiques
- Plan d’urgence pour les examens
« Il faut organiser des réunions pour encourager les enfants à retourner à l’école et inciter les parents à les y envoyer »
Mais comment appliquer ces mesures quand les routes deviennent des champs de bataille ? La question de la sécurisation des axes routiers se pose avec acuité, de nombreux élèves devant parcourir de longues distances pour atteindre leur établissement.
Un avenir compromis ?
Avec près de 60% des écoles de la zone affectées par les conflits récurrents, c’est toute une génération qui risque de basculer dans l’analphabétisme. Les spécialistes alertent sur les risques à moyen terme :
- Recrudescence du travail infantile
- Enrôlement forcé dans les milices
- Exode rural accru
Alors que le gouvernement promet une « réponse graduée », sur le terrain, enseignants et parents improvisent des solutions. Certains organisent des cours clandestins dans des maisons privées, d’autres utilisent des supports radiophoniques. Mais ces initiatives fragmentées suffiront-elles à endiguer cette hémorragie éducative ?
Article Ecrit par Yvan Ilunga
Source: radiookapi.net