La nuit du 9 au 10 mai 2024 restera gravée dans la mémoire du village Kasaza comme un cauchemar liquide. En quelques heures, des trombes d’eau ont transformé le territoire de Fizi (Sud-Kivu) en paysage apocalyptique : cent morts, des dizaines de disparus, des familles entières balayées par la furie des éléments. Une semaine plus tard, une délégation gouvernementale découvre l’ampleur du désastre – mais face à l’urgence humanitaire, les mots de compassion suffiront-ils ?
Le lac Tanganyika lui-même semble avoir rompu son pacte ancestral avec les riverains. Des maisons réduites à des amas de boue, des dispensaires submergés accueillant femmes enceintes et blessés, des enfants errant sans abri : le bilan des inondations au Sud-Kivu donne froid dans le dos. « Les populations manquent de tout », alerte Samy Kalonji, administrateur du territoire de Fizi. Son appel résonne comme un cri dans la tempête : besoins médicaux urgents, nourriture, reconstruction…
Derrière cette catastrophe Kasaza, une question brûlante se profile : pourquoi ces communautés riveraines restent-elles si vulnérables ? L’absence de systèmes d’alerte précoce, la déforestation massive des bassins-versants, l’urbanisation anarchique – autant de bombes à retardement écologiques. Le changement climatique, lui, frappe deux fois : en intensifiant les pluies diluviennes tout en réduisant la capacité des sols à absorber l’eau.
La visite de la délégation gouvernementale à Fizi soulève autant d’espoirs que d’interrogations. Les promesses d’aide tiendront-elles face à l’ampleur des dégâts matériels ? Comment éviter que le lac Tanganyika ne devienne à la fois nourricier et bourreau pour ces populations démunies ? Les autorités évoquent un « plan d’action concret », mais sur le terrain, les survivants attendent des actes.
Cette tragédie sonne comme un avertissement glaçant. Alors que la saison des pluies bat son plein en RDC, combien d’autres villages vivent sous la menace des eaux ? L’aide humanitaire au Sud-Kivu ne doit pas être un sparadrap sur une fracture sociale. Elle exige une refonte complète des politiques de prévention des risques – avant que d’autres Kasaza ne sombrent dans l’oubli.
Article Ecrit par Miché Mikito
Source: radiookapi.net