Dans un contexte où le désenclavement des régions reculées reste un défi majeur pour la République Démocratique du Congo (RDC), la société Plantations et Huileries du Congo (PHC) vient d’écrire un chapitre concret de son engagement social. La réhabilitation de la route Bokala-Wamba (38 km) et du pont Loleka (30 mètres) dans la province de la Tshopo marque une avancée structurelle pour trois territoires – Yahuma, Basoko et Isangi – longtemps confrontés à l’isolement.
Ces infrastructures, livrées en avril 2024 dans le cadre des clauses sociales, transforment déjà la donne économique locale. « Cette route est une artère vitale qui va fluidifier l’écoulement de 85% de la production agricole de la zone », explique Alphonse Bosuki, chef du groupement Bokala. Un argument corroboré par les données : le trafic journalier estimé à 200 véhicules légers et 50 poids lourds devrait doubler d’ici 2025 selon les projections des experts en logistique.
Le pont Loleka, conçu pour supporter 20 tonnes, constitue quant à lui un véritable catalyseur d’intégration interterritoriale. Son inauguration, marquée par des rites coutumiers, symbolise l’effacement progressif d’une fracture historique entre Yahuma et Isangi. « Avant, le franchissement du cours d’eau prenait trois heures en saison sèche et devenait impossible en période de pluies », témoigne un transporteur local. Désormais, ce goulet d’étranglement disparu, les échanges avec Kisangani – plaque tournante économique à 180 km – entrent dans une nouvelle dynamique.
Les retombées socio-économiques s’annoncent multidimensionnelles :
- Réduction de 40% des coûts de transport selon une étude préliminaire
- Augmentation anticipée de 25% des surfaces cultivables
- Accès élargi à 15 centres de santé et 12 établissements scolaires
Pour Darly Ifali, Area Social Manager de PHC, « ces infrastructures incarnent plus qu’un investissement : c’est un contrat de confiance renouvelé avec les communautés ». Une vision partagée par Baudouin Likasakoy Likuku, chef de secteur de Bolinga, qui insiste sur l’impératif de préservation : « Ce pont doit traverser les générations. Sa durabilité dépend de notre vigilance collective ».
Sur le plan macroéconomique, ces réalisations s’inscrivent dans une stratégie plus large de développement des corridors agricoles. La Tshopo, qui contribue à hauteur de 12% au PIB agricole national selon la Banque Centrale du Congo, pourrait voir sa productivité augmenter de 15% grâce à ces nouvelles voies de désenclavement.
Reste à présent à mesurer l’effet d’entraînement sur les chaines de valeur locales. Les spécialistes en développement territorial soulignent l’urgence d’accompagner ces infrastructures physiques par des investissements complémentaires :
- Création de centres de collecte agricole
- Modernisation des outils de transformation
- Renforcement des capacités commerciales des coopératives
PHC, qui a investi 2,5 millions USD dans ces projets selon des sources internes, semble consciente de ces enjeux. Achille Mulandu, chef de site adjoint à Lokutu, évoque déjà « une première phase devant être consolidée par des partenariats publics-privés innovants ».
Alors que la RDC cherche à diversifier son économie au-delà des minerais, ces réalisations offrent un modèle reproductible. La jonction entre responsabilité sociale des entreprises et politique publique d’aménagement du territoire pourrait bien écrire une nouvelle page du développement congolais. Mais gare aux illusions : comme le rappelle un économiste kisanganais sous couvert d’anonymat, « les routes ne valent que par ce qu’elles transportent. Leur utilité réelle se mesurera à l’aune des emplois créés et des inégalités réduites ».
Un défi que les acteurs locaux entendent relever. Avec la route Bokala-Wamba et le pont Loleka, c’est tout un écosystème économique qui se met en mouvement. Reste à voir si cette dynamique parviendra à irriguer l’ensemble du tissu productif de la Tshopo, transformant ainsi des infrastructures en leviers de prospérité partagée.
Article Ecrit par Amissi G
Source: radiookapi.net