La cité de Makobola, dans le groupement des Babungwe Nord au Sud-Kivu, vit des heures sombres. Une nouvelle vague de violences et de pillages a frappé la localité dans la nuit du lundi au mardi, semant la terreur parmi une population déjà meurtrie par l’histoire. Les auteurs de ces actes ? Des militaires des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et leurs alliés wazalendo. Ces événements rappellent tragiquement les heures les plus sombres du passé de cette région.
Selon plusieurs sources concordantes, les troubles ont éclaté suite à une mésentente entre des éléments de deux unités militaires. D’un côté, les militaires de l’unité Guépard, qui revenaient du front de Kigongo à Uvira. De l’autre, ceux de l’unité Hiboux. Les raisons précises de cette dissension entre les commandements restent à élucider, mais les conséquences, elles, sont déjà bien visibles et douloureuses pour les civils pris en étau.
Le centre de santé Iàmba, principale structure sanitaire de la zone, situé dans le sous-village de Bangwe, a été la cible principale de cette expédition violente. Les portes ont été forcées de nuit, ouvrant la voie à un pillage systématique et méthodique. Les assaillants ont d’abord fracturé l’accès à la pharmacie, emportant la totalité des médicaments. Puis, ils se sont introduits dans le bureau de l’infirmière titulaire, volant tous les matériels médicaux et saccageant les lieux. Comment une communauté peut-elle se relever lorsque son unique centre de soins est ainsi dévasté ?
Le pillage ne s’est malheureusement pas limité à l’infrastructure de santé. Les militaires et wazalendo se sont également attaqués aux habitations civiles. Portes enfoncées, biens saisis sans ménagement : chèvres, poules, vivres, rien n’a été épargné. Les récits des habitants, recueillis localement, dépeignent une scène de désolation totale. Des familles entières se sont retrouvées dépouillées de leurs maigres possessions, plongeant un peu plus dans la précarité une population qui lutte déjà pour sa survie quotidienne.
Le tableau est encore plus sombre avec les multiples cas d’agressions sexuelles rapportés. Des femmes ont été contraintes d’aider les pillards à transporter le butin, avant d’être violées. Ces actes barbares, perpétrés par ceux-là mêmes qui sont censés garantir la sécurité, ont profondément choqué et révolté la société civile locale. Où est la protection promise ? Où est le respect des droits les plus fondamentaux lorsque l’uniforme devient un outil de terreur ?
Face à cette situation intolérable, la société civile locale monte au créneau. Elle dénonce avec véhémence ces exactions commises par des éléments armés et exige qu’une enquête approfondie et transparente soit ouverte dans les plus brefs délais. L’impunité ne peut plus être la règle. Identifier les responsables, tant ceux qui ont donné les ordres que les exécutants, est une condition sine qua non pour rendre justice aux victimes et éviter la répétition de tels drames.
Ces événements récents ravivent un traumatisme profond à Makobola. La localité porte encore les stigmates du massacre de plus d’un millier de personnes perpétré par des rebelles en 1996. Chaque nouvelle violence réactive cette mémoire douloureuse, renforçant un sentiment d’abandon et d’insécurité chronique. La population, en état de choc, cherche des réponses et une protection durable. La communauté internationale et les autorités nationales peuvent-elles rester sourdes à cette détresse ?
Les pillages à Makobola et les violences militaires au Sud-Kivu posent une fois de plus la question cruciale de la discipline au sein des FARDC et de leurs alliés. L’incident met en lumière les tensions internes qui peuvent dégénérer au détriment des civils. La collaboration avec les groupes wazalendo, nécessaire sur le plan opérationnel dans la lutte contre les groupes armés, doit s’accompagner d’un cadre strict de responsabilité. Le centre de santé Iàmba pillé symbolise l’effondrement d’un service public essentiel, tandis que les agressions sexuelles en RDC rappellent l’urgence d’une protection renforcée des femmes en période de conflit. La route vers la paix et la stabilité dans l’Est de la RDC passe par la restauration de la confiance entre l’armée et la population, une confiance aujourd’hui gravement ébranlée.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
