Dans un climat politique tendu au Maniema, le gouverneur Moïse Moussa monte au créneau pour défendre son bilan. Lors d’une conférence de presse tenue à Kindu, le chef de l’exécutif provincial a catégoriquement rejeté les accusations de détournement fonds rétrocession Maniema, les qualifiant de manœuvre destinée à entacher sa réputation. Cette sortie publique, aussi ferme que calculée, intervient alors qu’une tempête politique secoue la province, révélant des fractures profondes au sein même de l’équipe dirigeante.
Le gouverneur a, avec une précision arithmétique, déconstruit les allégations portées contre lui. Il a rappelé un fait institutionnel souvent méconnu : « Le pouvoir central n’a effectué que deux rétrocessions depuis le début de l’année en cours », a-t-il déclaré, insistant sur le fossé entre les perceptions et la réalité des transferts financiers. Poussant plus loin sa démonstration, Moïse Moussa a fustigé l’absence de preuves concrètes : « Leur auteur n’a pas été capable de les prouver devant les députés provinciaux. (…) Il est connu que, jusqu’à présent, nous n’avons reçu que deux mois de rétrocession, janvier et février derniers. » Cette défense, appuyée sur des données chiffrées, vise à repositionner le débat sur le terrain de la gestion, éclipsant momentanément les questions d’éthique.
Mais derrière ces chiffres se cache un enjeu de gouvernance crucial. Le gouverneur a également révélé que la Régie financière du Maniema ne mobilisait actuellement qu’environ 53% des ressources attendues, soit une somme oscillant entre 30 000 et 35 000 dollars américains. Cette information soulève une question rhétorique majeure : dans un contexte de ressources aussi limitées, une gestion opaque serait-elle simplement viable, ou bien ces accusations servent-elles un autre agenda ? La fronde trouve son origine dans une correspondance acerbe du vice-gouverneur Corneille Katisamba, actuellement déchu. Ce dernier, dans une surenchère accusatoire, a imputé à l’Assemblée provinciale du Maniema de couvrir des malversations qu’il estime se chiffrer en plusieurs millions. Une charge qui transforme un différend administratif en une crise de confiance institutionnelle.
La genèse de cette crise éclaire les stratégies politiques à l’œuvre. Elle prend racine dans une motion déchéance Maniema votée contre le vice-gouverneur. Initialement, les députés provinciaux avaient interpellé Corneille Katisamba pour son incapacité à présenter l’édit du budget province Maniema pour l’exercice 2026. Cette motion d’interpellation, instrument de contrôle parlementaire classique, s’est métamorphosée en une motion de déchéance, arme politique bien plus lourde de conséquences. Le gouverneur Moïse Moussa joue-t-il alors une partition risquée en s’opposant frontalement à son ancien collaborateur ? Son démenti public apparaît comme une tentative de reprendre la main sur un narratif qui lui échappe, tout en isolant politiquement son accusateur.
Les implications de cette affaire dépassent le simple cadre d’une querelle personnelle. Elle met en lumière les dysfonctionnements chroniques dans la gestion des finances provinciales et la facilité avec laquelle les procédures parlementaires peuvent être détournées pour régler des comptes politiques. La crédibilité de l’ensemble de l’exécutif provincial est désormais en jeu. Si les accusations de Katisamba restent à ce jour non étayées, leur simple existence et la médiatisation du conflit affaiblissent la légitimité de l’administration Moussa. Le gouverneur parviendra-t-il à restaurer une unité de façade, ou cette crise annonce-t-elle un début de délitement de sa majorité ?
L’épilogue de cette saga se jouera sur plusieurs tableaux. D’abord, la capacité de Moïse Moussa à finaliser et faire adopter le budget province Maniema 2026, pierre d’achoppement initiale de la crise, sera scrutée comme un test de son autorité retrouvée. Ensuite, la réaction de l’Assemblée provinciale, qui a jusqu’ici semblé le protéger, sera déterminante. Une bascule des alliances n’est pas à exclure si de nouveaux éléments venaient à émerger. Enfin, l’attitude du pouvoir central face à ces remous locaux constituera un signal fort. Restera-t-il en retrait, considérant cela comme un conflit interne, ou interviendra-t-il pour apaiser une situation qui pourrait nuire à la stabilité de la région ? Les prochaines semaines seront décisives pour l’avenir politique du Maniema et pour la carrière de Moïse Moussa, désormais contraint de gouverner sous le feu des suspicions.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
