La Cour constitutionnelle de la République démocratique du Congo est saisie de deux requêtes en inconstitutionnalité introduites par l’ancien ministre de la Justice, Constant Mutamba. Les deux recours, dont l’examen est prévu ce vendredi, pourraient influer sur le cours des procédures judiciaires engagées contre cette figure politique. Une bataille procédurale d’une haute importance s’engage donc devant la plus haute juridiction du pays, dont la décision est impatiemment attendue par les observateurs du monde judiciaire et politique.
La première requête déposée par Constant Mutamba vise directement deux résolutions de l’Assemblée nationale. Il s’agit des résolutions n°002 du 29 mai 2025 et n°004 du 15 juin 2025, qui avaient autorisé l’instruction et les poursuites à son encontre. Le dossier est formellement inscrit au rôle des affaires en cours normal et doit être appelé à l’audience publique du 19 décembre à 11 heures précises. Cette procédure soulève des questions fondamentales sur l’équilibre des pouvoirs et la régularité des autorisations de poursuite contre un ancien membre du gouvernement.
La seconde requête en inconstitutionnalité introduite par l’ancien ministre porte, quant à elle, sur un arrêt avant dire droit rendu par la Cour de cassation. Le requérant estime que cette décision intermédiaire est contraire à plusieurs dispositions essentielles de la Constitution congolaise. Ce recours met en lumière les tensions potentielles entre les différentes branches de l’appareil judiciaire et interroge sur la cohérence de l’interprétation des textes fondamentaux. La Cour constitutionnelle devra ainsi se prononcer sur la conformité de la procédure suivie par la plus haute juridiction ordinaire.
Le contexte de ces requêtes est marqué par la condamnation définitive de Constant Mutamba, prononcée le 2 septembre 2025 par la Cour de cassation. L’ancien garde des Sceaux a été condamné à trois ans de travaux forcés pour détournement de fonds publics. Cette affaire grave portait sur un montant de 19 millions de dollars américains, destinés initialement à la construction d’une prison à Kisangani, dans la province de la Tshopo. La haute juridiction avait également prononcé, à son encontre, une interdiction de cinq ans d’accéder à toute fonction publique, une peine complémentaire lourde de conséquences.
Les recours en inconstitutionnalité constituent-ils une ultime manœuvre procédurale ou une défense légitime fondée sur des vices de forme ? La réponse appartiendra à la Cour constitutionnelle, dont la mission est de garantir la suprématie de la Loi fondamentale. L’examen de ces requêtes s’annonce technique et complexe, nécessitant une analyse minutieuse des textes et de la jurisprudence. L’issue de cette audience pourrait soit confirmer l’irréversibilité de la condamnation, soit rouvrir un chapitre judiciaire que beaucoup pensaient clos.
La procédure de détournement de fonds publics concernant le projet de Kisangani avait défrayé la chronique, illustrant les défis de la gestion des deniers publics en RDC. La condamnation de Constant Mutamba par la Cour de cassation avait été perçue comme un signal fort dans la lutte contre la corruption des hauts fonctionnaires. Toutefois, les recours actuels démontrent que l’arène judiciaire congolaise reste un terrain où chaque décision peut être contestée jusqu’aux dernières limites du droit.
Les observateurs suivront avec attention les débats de la Cour constitutionnelle. Sa décision aura une portée qui dépasse le seul cas de l’ancien ministre de la Justice, car elle touchera aux prérogatives du Parlement et à l’autorité de la chose jugée par la Cour de cassation. L’indépendance et la crédibilité de l’institution sont ainsi mises à l’épreuve dans une affaire à forte résonance politique. Le procès pour détournement de fonds publics à Kisangani trouve donc un prolongement inattendu devant le juge constitutionnel.
Dans l’attente du verdict, la classe politique et la société civile congolaises s’interrogent sur les implications de cette audience. Une décision favorable à Constant Mutamba pourrait-elle remettre en cause le principe même des autorisations parlementaires de poursuite ? Quel serait l’impact sur les autres dossiers judiciaires impliquant d’anciens ministres ? L’audience de ce vendredi promet d’être un moment décisif, non seulement pour le requérant, mais aussi pour la consolidation de l’État de droit en République démocratique du Congo.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
