La province du Tanganyika est en état d’alerte maximale. Une tentative d’évasion à la prison centrale de Kalemie, survenue dans un contexte de grande tension sécuritaire, a plongé la population dans la psychose. Cet incident, directement lié à la chute de la ville voisine d’Uvira aux mains de la rébellion du M23, a conduit les autorités provinciales à prendre des mesures drastiques pour sécuriser la région.
Une réaction en chaîne après la chute d’Uvira
La prise de la ville d’Uvira par les forces du M23 a créé un choc profond dans la province voisine du Tanganyika. La proximité géographique de cette zone de conflit a immédiatement généré un vent de panique parmi les habitants de Kalemie et des localités frontalières. Comment les autorités allaient-elles contenir la menace et rassurer une population traumatisée par l’avancée rebelle ? La réponse est venue sous la forme d’un train de mesures exceptionnelles, annoncées à l’issue d’un Conseil de sécurité extraordinaire présidé par le gouverneur Christian Kitungwa Muteba à Kalemie.
Un blocus et un couvre-feu pour la sécurité du Tanganyika
Face à l’urgence, le gouvernement provincial a décidé de couper les ponts, littéralement. La mesure la plus significative est la fermeture immédiate de tout trafic entre le Tanganyika et le Sud-Kivu, y compris sur les eaux du Lac Tanganyika. Cette décision radicale, visant à empêcher toute infiltration, illustre le niveau de menace perçu. Parallèlement, le trafic aérien est également restreint avec la fermeture de l’aérodrome de Kanunka, près de Manono, et de celui de Kisengo dans le territoire de Nyunzu, deux infrastructures appartenant à la société minière MMR.
Sur le terrain, les Forces Armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) ont reçu pour ordre d’intensifier les patrouilles de combat sur l’ensemble du territoire provincial. Les postes frontaliers font l’objet d’un renforcement des contrôles. La ville de Kalemie, épicentre de la nervosité, se prépare à vivre au rythme de checkpoints et de restrictions sévères. La circulation des motos et des piétons est interdite à partir de 22 heures, une mesure étendue à l’interdiction de tout rassemblement religieux nocturne passé cette heure. Même les véhicules à vitres teintées se voient proscrits dans la capitale provinciale.
L’évasion de Kalemie, le déclic d’une crise sécuritaire
L’élément déclencheur de cette escalade sécuritaire reste la tentative d’évasion à la prison centrale de Kalemie. Cet événement, survenant dans une période déjà extrêmement volatile, a agi comme un électrochoc. Les faits sont clairs : cinq détenus ont réussi à prendre la fuite, laissant trois personnes blessées dans leur sillage. Face à ce coup de force, les autorités pénitentiaires et sécuritaires ont réagi avec célérité. Les prisonniers considérés comme les plus dangereux ont immédiatement été transférés vers des centres de détention de haute sécurité à Lubumbashi et Kisangani, afin d’éviter tout nouvel incident.
Cette évasion à la prison de Kalemie a exposé la vulnérabilité des infrastructures face à un possible débordement du conflit. Elle a aussi cristallisé les craintes d’une collusion entre les évadés et les groupes armés actifs dans la région, justifiant ainsi la fermeté des mesures décrétées par le gouverneur Kitungwa. Le spectre de l’instabilité se profile-t-il plus largement dans l’est de la RDC ?
Le gouverneur Kitungwa en première ligne
Porteur d’un message de fermeté, le gouverneur Christian Kitungwa Muteba a tenté de calmer les esprits tout en affichant une détermination sans faille. De retour d’une mission à Kinshasa, il a immédiatement pris les choses en main. Devant la population de Kalemie, il a lancé un appel à la résistance, promettant de se battre “jusqu’à la dernière goutte de sang” contre l’ennemi. Ses annonces lors du Conseil de sécurité extraordinaire traduisent cette volonté d’action préventive et de contrôle total de l’espace public.
Les mesures du gouverneur Kitungwa forment un dispositif global de verrouillage de la province. De la suspension du trafic avec le Sud-Kivu au couvre-feu strict en passant par le renforcement militaire, chaque décision vise à créer un cordon sanitaire autour du Tanganyika. L’objectif est double : empêcher la contagion du conflit et rétablir un sentiment de sécurité chez des habitants pris de court par la rapidité des événements à Uvira.
Une attente anxieuse pour les populations
Aujourd’hui, le Tanganyika retient son souffle. Les routes vers le Sud-Kivu sont désertes, le lac Tanganyika voit son trafic maritime interrompu, et les nuits à Kalemie sont silencieuses, troublées seulement par le passage des patrouilles. La prise d’Uvira par le M23, bien que suivie d’une annonce de retrait des rebelles, a durablement altéré le paysage sécuritaire local. Les mesures prises sont-elles suffisantes pour garantir la stabilité ? Seul l’avenir le dira.
Pour l’heure, la priorité absolue des autorités reste le maintien de l’ordre et la prévention de toute extension de la violence. Le transfert des détenus dangereux, conséquence directe de l’évasion de la prison de Kalemie, et le déploiement massif des FARDC démontrent une prise de conscience aiguë des risques. La province du Tanganyika, en première ligne face à la tourmente qui secoue l’est de la RDC, vit désormais au rythme d’un état de siège de fait, dans l’attente d’une normalisation qui tarde à venir.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
