La localité stratégique de Luvungi, dans le territoire d’Uvira au Sud-Kivu, est tombée aux mains des rebelles de l’AFC/M23 ce samedi 6 décembre. Cette prise de contrôle intervient après deux jours d’affrontements intenses ayant opposé le groupe armé aux Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), soutenues par l’armée burundaise et les milices locales wazalendo. Une source sécuritaire de confiance a confirmé l’événement, marquant un nouveau tournant dans l’instabilité chronique de la région.
Les combats dans la plaine de la Ruzizi, qui durent depuis six jours, se sont brutalement intensifiés ces dernières 48 heures. Les rebelles, après avoir consolidé leurs positions sur un axe allant de Kamanyola à Lubarika, ont lancé une offensive décisive sur Luvungi. Face à la puissance de feu déployée, la coalition gouvernementale a indiqué avoir opéré un repli tactique. Cette manœuvre, selon les déclarations officielles, aurait pour objectif de préserver les vies civiles dans une zone à forte densité de population. Mais cette retraite stratégique laisse-t-elle le champ libre à une avancée plus profonde des insurgés ?
Les conséquences humanitaires sont immédiates et dramatiques. Un mouvement de panique a saisi les populations civiles prises au piège des bombardements. Des centaines de familles ont fui les localités de Luvungi, Bwegera et Lubirizi pour chercher refuge à Sange, situé à une trentaine de kilomètres. Les autorités locales basées à Uvira rapportent des pertes en vies humaines directement liées aux tirs d’artillerie. « Avec tous ces bombardements, il y a eu mort d’hommes », a déploré une source autorisée, illustrant le lourd tribut payé par les non-combattants. Le déplacement des civils vers Sange crée une nouvelle pression humanitaire dans cette localité déjà fragile.
La prise de Luvungi par l’AFC/M23 n’est pas un événement isolé. Elle s’inscrit dans une série de manœuvres offensives du groupe rebelle dans la plaine de la Ruzizi, une zone frontalière cruciale et historiquement instable. La localité conquise se trouve à environ soixante kilomètres d’Uvira, ville côtière du lac Tanganyika qui abrite actuellement les institutions provinciales du Sud-Kivu. Cette proximité géographique avec un centre administratif majeur soulève des questions urgentes sur la capacité des forces gouvernementales à contenir la menace.
L’engagement de l’armée burundaise aux côtés des FARDC dans ces combats au Sud-Kivu RDC ajoute une dimension régionale complexe au conflit armé. Cette intervention directe d’une force étrangère, bien que dans le cadre d’accords de coopération, modifie l’équilibre des forces sur le terrain et pourrait influencer la dynamique géopolitique locale. Les motivations et la durée de cet engagement restent des sujets d’observation attentive pour les analystes de la sécurité dans la région des Grands Lacs.
La situation sur le terrain reste extrêmement volatile. Les lignes de front évoluent rapidement, et les informations en temps réel sont fragmentaires en raison de l’insécurité et des difficultés d’accès pour les observateurs indépendants. La stratégie des rebelles de l’AFC/M23, qui semblent poursuivre leur expansion territoriale dans la plaine de la Ruzizi, laisse présager de nouvelles tensions dans les jours à venir. La coalition gouvernementale parviendra-t-elle à reprendre l’initiative et à contrer cette avancée ?
Les défis logistiques et sécuritaires pour les organisations humanitaires sont devenus colossaux. L’afflux de personnes déplacées à Sange nécessite une réponse urgente en termes d’abri, de nourriture, de soins médicaux et de protection. La saison des pluies, qui sévit actuellement dans la région, aggrave les conditions de vie des familles en fuite, exposées aux intempéries et aux risques sanitaires. La communauté humanitaire appelle à un accès sécurisé et sans entrave pour pouvoir porter assistance aux victimes de ce nouveau cycle de violence.
Cet épisode souligne une fois de plus la fragilité persistante de la sécurité dans l’est de la République démocratique du Congo. Malgré la présence de multiples acteurs militaires et des efforts de stabilisation, la population civile continue de payer le prix fort d’un conflit armé aux racines complexes. La prise de Luvungi par les rebelles du M23 pose une question fondamentale : comment mettre un terme durable à cette spirale de violence qui déplace les civils et entrave tout développement dans la région du Sud-Kivu ? La réponse à cette interrogation déterminera l’avenir immédiat de milliers de Congolais.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
