Dans une déclaration conjointe rendue publique jeudi, les États-Unis et la Commission européenne ont réitéré leur volonté commune de soutenir la paix et la croissance économique dans la région des Grands Lacs. Cet engagement s’articule principalement autour du Corridor de Lobito, un projet d’infrastructure ferroviaire ambitieux destiné à relier la République démocratique du Congo au port angolais de Lobito sur l’océan Atlantique. Washington et Bruxelles estiment que le développement économique constitue la clé d’une stabilité durable et entendent créer un environnement propice à une augmentation significative des investissements américains et européens en Afrique centrale.
Considéré comme un axe « transformateur », le Corridor de Lobito n’est pas qu’une simple voie ferrée. Il s’agit d’un projet géostratégique visant à renforcer les chaînes d’approvisionnement en minerais critiques, dont la RDC est un producteur majeur. Cobalt, cuivre, lithium : ces ressources essentielles à la transition énergétique mondiale sont au cœur des enjeux économiques et sécuritaires de la région. En améliorant la connectivité entre l’hinterland congolais et la côte atlantique, ce corridor doit permettre de fluidifier les exportations tout en stimulant une croissance plus inclusive et durable pour les populations locales.
Le contexte géopolitique des Grands Lacs, marqué par des décennies de conflits et d’instabilité, explique en partie cet intérêt soudain des puissances occidentales. La déclaration insiste sur la nécessité de faire du développement économique la pierre angulaire de la sécurité régionale. Une approche qui répond à une double urgence : sécuriser l’accès à des matières premières stratégiques pour les industries américaines et européennes, tout en contribuant à la pacification d’une zone cruciale pour le continent. Mais cette initiative peut-elle véritablement concilier ces objectifs parfois divergents ?
Les deux partenaires affirment travailler en étroite collaboration avec le secteur privé et les gouvernements africains concernés pour réhabiliter et moderniser l’infrastructure existante. Des discussions sont déjà en cours entre investisseurs privés et autorités congolaises concernant le financement de la portion du corridor située en RDC. L’objectif est de faire de cette artère ferroviaire un catalyseur du développement régional, capable d’ouvrir de nouvelles voies pour les échanges commerciaux entre l’Afrique centrale, l’Europe et les États-Unis.
Sur le plan pratique, Washington et Bruxelles se disent prêts à étudier des mécanismes de financement innovants pour assurer la synchronisation entre les futurs investissements en RDC et les travaux de réhabilitation déjà engagés en Angola. Cette coordination est présentée comme essentielle pour maximiser l’efficacité et le succès global du projet. La déclaration souligne la volonté de rester « pleinement alignés et coordonnés » pour garantir des chaînes d’approvisionnement plus transparentes et des investissements durables.
Cette annonce intervient dans un paysage concurrentiel où d’autres acteurs, notamment la Chine, ont déjà établi une influence économique considérable en RDC et dans la région. Les investissements États-Unis UE Afrique, via le Corridor de Lobito, apparaissent ainsi comme une tentative de rééquilibrer l’influence économique et d’offrir une alternative aux partenariats existants. Le projet pourrait-il devenir un modèle de coopération tripartite réussie entre l’Afrique, l’Europe et l’Amérique du Nord ?
Les implications pour la RDC et l’Angola sont potentiellement majeures. Une infrastructure RDC Angola modernisée pourrait non seulement dynamiser les économies locales, mais aussi modifier la carte logistique du continent. En réduisant les délais et les coûts de transport, le corridor faciliterait l’exportation des minerais et diversifierait les débouchés commerciaux. Cependant, sa réussite dépendra de la capacité à assurer la sécurité le long du tracé, à lutter contre la corruption et à garantir que les retombées profitent effectivement aux populations.
En conclusion, la déclaration conjointe des États-Unis et de la Commission européenne marque une étape importante dans la concrétisation du Corridor de Lobito. Elle témoigne d’une vision stratégique où le développement économique des Grands Lacs est inextricablement lié à la sécurité des approvisionnements mondiaux en ressources critiques. Si les engagements financiers et politiques se traduisent en actions sur le terrain, ce projet d’infrastructure pourrait initier une nouvelle dynamique de croissance et de stabilité pour l’Afrique centrale. L’avenir dira si cette initiative parvient à tenir ses promesses de transformation durable, dans une région où les espoirs de développement ont souvent été déçus.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: Actualite.cd
