Une fusillade d’une violence rare a éclaté ce mardi 2 décembre à Djugu-centre, en territoire de Djugu, province de l’Ituri. Le bilan est lourd pour les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) : deux militaires ont été tués sur le coup et un autre se trouve en état critique, grièvement blessé. La source des tirs ? Des soldats de l’Uganda People’s Defence Force (UPDF), l’armée ougandaise, pourtant engagée aux côtés des FARDC dans des opérations conjointes contre les groupes armés dans l’est de la RDC.
Comment une telle tragédie a-t-elle pu survenir entre des forces considérées comme partenaires ? L’incident trouve son origine dans une arrestation contestée. Selon des sources sécuritaires et administratives concordantes, des militaires ougandais ont procédé, dans les heures précédant l’affrontement, à l’interpellation de deux civils soupçonnés d’appartenir à la milice CODECO, active dans la région. Des éléments des FARDC se seraient alors rendus au camp de l’UPDF pour exiger la libération des deux hommes, faisant monter la tension.
La situation a brutalement dégénéré vers 10 heures, à proximité immédiate du bureau de l’administrateur du territoire de Djugu. Des tirs nourris ont retenti, créant un vent de panique parmi la population civile. Des témoins et l’administration locale pointent du doigt le comportement de certains soldats ougandais, qui auraient ouvert le feu en état d’ébriété sur une position des FARDC, déclenchant un échange de coups de feu intense entre les deux camps. Les détonations ont été si violentes qu’elles ont brisé les vitres de la radio communautaire Amani, située à proximité de la zone de l’affrontement.
Le bilan matériel, provisoire mais éloquent, témoigne de la gravité de l’accrochage. Outre les pertes en vies humaines, les soldats ougandais se seraient emparés, selon nos informations, de deux fusils d’assaut AK-47, de deux caisses de munitions, de six chargeurs garnis et d’une somme d’argent s’élevant à 1,6 million de francs congolais. Parmi les victimes figure le garde du corps du commandant militaire de la place de Djugu, ajoutant un caractère symbolique fort à cette perte pour l’armée congolaise.
Cet incident militaire en Ituri, survenu à Djugu-centre, à 75 kilomètres au nord de Bunia, plonge la région dans une psychose profonde. La population, déjà éprouvée par des années de conflits et la présence de multiples groupes armés, vit dans la crainte de nouvelles violences. La confiance, déjà fragile, entre les forces congolaises et leurs homologues ougandais risque d’être sérieusement entamée par ce drame. Les relations entre la RDC et l’Ouganda, historiquement complexes, sont-elles à un nouveau point de rupture ?
Face à l’urgence, une délégation officielle s’est rendue sur les lieux ce mercredi 3 décembre. Menée par l’administrateur du territoire de Djugu lui-même, elle a pour mission de mener une enquête approfondie sur les circonstances exactes de cette fusillade meurtrière. L’objectif est clair : établir les responsabilités de chacun dans cet affrontement armé entre la RDC et l’Ouganda et éviter toute répétition d’un tel scénario catastrophique.
Les questions restent nombreuses. Quel était le mandat précis des soldats ougandais impliqués dans l’arrestation initiale ? Les procédures de coordination entre les deux armées ont-elles été respectées ? Les autorités militaires des deux pays doivent impérativement apporter des réponses transparentes et rapides pour calmer les esprits. La sécurité dans l’Ituri, une province cruciale pour la stabilité de toute la région, ne peut se construire sur des malentendus meurtriers entre forces supposées alliées.
Cet événement tragique rappelle avec brutalité les défis immenses de la coopération sécuritaire dans la région des Grands Lacs. Alors que la communauté internationale appelle à une action concertée contre les groupes négatifs, la confiance entre les acteurs sur le terrain reste un bien précieux et fragile. La priorité absolue doit maintenant être donnée à une enquête rigoureuse, au dédommagement des familles des soldats tués à Djugu, et à la mise en place de mécanismes clairs pour prévenir tout nouvel incident de ce type. La paix en Ituri en dépend.
Article Ecrit par Cédric Botela
Source: radiookapi.net
