La tension monte à Luebo, dans la province du Kasaï, où des enseignants en colère ont érigé des barricades et lancé des pierres pour exprimer leur frustration face à ce qu’ils considèrent comme un détournement de leurs salaires. Ces manifestations violentes visent directement Caritas-Développement, l’organisation chargée par le gouvernement de procéder au paiement des enseignants de la région.
« Comment pouvons-nous nourrir nos familles quand on nous prive d’un mois de salaire ? » s’interroge un enseignant qui préfère garder l’anonymat par crainte de représailles. Ce sentiment de colère palpable se répand comme une traînée de poudre dans les sous-provinces éducationnelles Kasaï 2 et Kasaï Central 2, où des centaines d’enseignants estiment avoir été lésés.
Face à cette crise sociale grandissante, le Père Pierre Mulumba, coordonnateur de Caritas-Développement/Luebo, tente de rétablir la vérité. « L’accusation portée contre Caritas est fausse. Nous n’avons reçu qu’un mois de salaire, celui de septembre, et c’est ce que nous avons payé », affirme-t-il catégoriquement. Cette déclaration contraste fortement avec les affirmations des enseignants qui soutiennent que Caritas aurait reçu deux mois de salaires mais n’en aurait versé qu’un seul.
La situation devient particulièrement préoccupante lorsque la protestation prend une tournure violente. Des agents payeurs de Caritas se sont retrouvés menacés, créant un climat d’insécurité qui complique davantage la résolution du conflit. À Bulungu, certaines personnes auraient même refusé de restituer des fonds perçus par erreur tout en maintenant leurs accusations contre l’organisation caritative.
Mais au-delà de ce face-à-face tendu, ne faut-il pas s’interroger sur le système de paiement des enseignants dans cette région ? Comment une organisation comme Caritas-Développement, réputée pour son travail humanitaire, se retrouve-t-elle au cœur d’une telle polémique ? La question du flux des fonds publics et de leur gestion transparente se pose avec acuité dans un contexte où la précarité des enseignants congolais reste un problème structurel persistant.
Caritas-Développement appelle aujourd’hui à l’apaisement et exhorte les enseignants à s’adresser directement aux autorités compétentes pour toute réclamation. L’organisation réaffirme son engagement pour une gestion transparente, tout en rappelant qu’elle ne fait que distribuer les fonds mis à sa disposition par le gouvernement. Cette crise des paiements enseignants à Luebo révèle une fois de plus les fragilités du système éducatif congolais et la nécessité d’une meilleure communication entre toutes les parties prenantes.
Alors que le conflit entre Caritas et les enseignants du Kasaï persiste, on peut légitimement se demander quelles solutions durables pourront être trouvées pour éviter que de telles situations ne se reproduisent. La confiance, une fois ébranlée, pourra-t-elle être restaurée ? Les enseignants congolais méritent-ils de vivre dans l’incertitude permanente quant à la réception de leur salaire ? Ces questions dépassent le simple cadre du différend actuel et touchent à l’essence même de la dignité professionnelle et du droit à une rémunération juste et régulière.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: radiookapi.net
