Dans l’arène médiatique internationale, le ministre de la Communication et Médias Patrick Muyaya a déployé une stratégie diplomatique subtile lors de son entretien exclusif avec CGTN. Face à la chaîne internationale chinoise, le porte-parole du gouvernement congolais a esquissé les contours d’une nouvelle bataille informationnelle où le Sud global entend reprendre le contrôle de son propre récit.
La rencontre survenue en marge du Global South Media Partners Mechanism à Xi’an révèle une volonté affirmée de la RDC de s’inscrire dans ce rééquilibrage géomédiatique. Le ministre Muyaya n’a pas mâché ses mots pour dénoncer les « narrations historiques qui ont souvent desservi l’Afrique et l’Asie », pointant du doigt l’hégémonie des grands médias occidentaux dans la construction des perceptions internationales.
Quelle stratégie la RDC déploie-t-elle pour contrer cette domination narrative ? La réponse du ministre s’articule autour d’un renforcement systématique des coopérations médiatiques Sud-Sud. Les accords signés dès 2023 entre l’Agence congolaise de presse et l’agence Xinhua, ainsi qu’entre la RTNC et China Media Group, témoignent de cette orientation stratégique. Cette coopération médiatique RDC Chine constitue le pilier d’une offensive douce visant à établir ce que Patrick Muyaya qualifie de « narratif juste » sur l’Afrique.
Le ministre congolais a su habilement relier cette bataille médiatique aux enjeux économiques cruciaux pour le développement du continent. En évoquant les 50 milliards de dollars d’investissements chinois annoncés par le président Xi Jinping, Patrick Muyaya esquisse les contours d’une diplomatie médiatique au service des intérêts nationaux. « Nous travaillons à rendre nos projets éligibles, mais il est essentiel que nos populations soient informées de ces perspectives », a-t-il souligné, reconnaissant ainsi le rôle crucial des médias dans l’acceptabilité sociale des partenariats économiques.
Cette vision dépasse le simple cadre informationnel pour embrasser les domaines culturels et cinématographiques. Le ministre plaide pour une coopération étendue capable de promouvoir un « narratif équilibré » au service d’un développement partagé. Une approche holistique qui reconnaît que la bataille des perceptions se gagne autant dans les salles de rédaction que sur les écrans de cinéma.
Fait notable, Patrick Muyaya a pris soin de désamorcer toute interprétation conflictuelle de cette initiative du Sud global. « Ce que nous voulons, ce n’est pas constituer un bloc qui s’oppose à un autre, mais disposer des outils pour raconter ce que nous sommes vraiment », a-t-il précisé. Une déclaration qui révèle la subtilité du positionnement congolais : affirmer une voix autonome sans verser dans la confrontation frontale avec l’Occident.
Les relations RDC Chine semblent ainsi s’inscrire dans une logique de partenariat stratégique où les médias jouent le rôle de courroie de transmission essentielle. La visite du ministre à Shenzhen et son admiration pour le saut technologique chinois illustrent cette volonté d’apprentissage mutuel. Reste à savoir si cette coopération médiatique saura préserver l’indépendance éditoriale congolaise tout en permettant au pays de faire entendre sa voix sur la scène internationale.
Alors que la RDC ambitionne de jouer « pleinement son rôle de moteur d’un développement panafricain », selon les termes du ministre, la maîtrise des outils médiatiques apparaît comme un enjeu souverainiste majeur. La réussite de cette stratégie dépendra de la capacité des médias congolais à concilier partenariats internationaux et affirmation de leur spécificité éditoriale. Un équilibre délicat qui déterminera la place de la RDC dans le concert des nations.
Article Ecrit par Chloé Kasong
Source: Eventsrdc
